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Grèves

par Manuel Kellner
numéro

La tendance du nombre de grèves en Allemagne est ascendante. Mais ces grèves ne sont pour l'instant que de courtes grèves d'avertissement et le chemin à remonter est encore très long.

L'agence fédérale pour l'emploi (Arbeitsagentur) le confirme en donnant les chiffres : les grèves dans le cadre des négociations de nouvelles conventions collectives montrent une nette tendance à la hausse. En 2011, il y avait 14.259 salariés en grève ; en 2012, 35.702, soit plus du double. En 2012, les grèves ont coûté 97.197 journées de travail aux patrons, soit une augmentation de plus de 30 % par rapport à 2011. Et cette courbe ascendante semble se confirmer en 2013 avec les actions de IG Metall, qui demande 5,5% en matière salariale, et de Ver.di, le grand syndicat des services, avec des revendications semblables. Dans les deux secteurs, il y a une vague de grèves d'avertissement.

Synthèse actualisée Inprecor

Le patronat, lui, jusqu'à nouvel ordre, reste sur une position dure, et on ne peut donc pas prédire quand ces conflits sociaux trouveront leur fin avec des " solutions compromis » qui sont la tradition en Allemagne. En même temps, le patronat se plaint du taux élevé de grèves ultra-courtes (moins qu'une journée de travail ou seulement une journée de travail), le genre d'actions typiques des grèves d'avertissement et des petits secteurs à faible concentration de salariés comme les employés de l'aéronautique.

Mais ces chiffres qui montrent une tendance ascendante des grèves ne compensent pas la faiblesse des syndicats et du salariat, qui est loin d'être surmontée. En 2006, la grève dans les services publics impliquait 250.000 journées de travail, et en 1984, dans le cadre de la campagne de IG Metall et de la DruPa (à l'époque, le syndicat des imprimeurs, intégré plus tard dans IG Medien), il y a eu 6 millions de journées de travail arrachées au patronat !

Si l'on ajoute le fait que les syndicats du DGB, qui avaient presque 12 millions de membres en 1990 (après la fusion avec les syndicats de la défunte RDA), n'en ont plus que 6 millions aujourd'hui, on peut douter de la pertinence de la stratégie de " partenariat social » développée par les directions syndicales, qui, depuis de longues années, parlent d'une tactique des " piqûres d'aiguille » (" Nadelstiche ») cherchant à obtenir le maximum avec un minimum d'action.

Le problème, c'est qu'avec cette stratégie les syndicats s'affaiblissent eux-mêmes. Des générations entières de syndiqués et de salariés n'ont jamais de leur vie participé à un vrai mouvement de grève impliquant une action autonome et une auto-organisation des grévistes pendant plusieurs semaines. Ce manque d'expérience dans les techniques du combat social se paie cher.

S'ajoute à cela le " chacun pour soi » et la capitulation des directions syndicales devant la législation réactionnaire allemande interdisant les " grèves politiques ».

Seul un mouvement de grève intersectorielle massif pourrait changer les rapports de forces de manière décisive. ■

Köln, le 9 mai 2013

* Manuel Kellner est membre de IG Metall, du parti die Linke et de isl (gauche socialiste internationale, une des deux organisations de la IVe Internationale en Allemagne).

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