Réflexions sur l'occupation israélienne, l'Autorité palestinienne et l'avenir du mouvement national

par Julien Salingue
Photothèque Rouge/MB

Introduction

Le 3 octobre 2010, le président palestinien de facto (1), Mahmoud Abbas, déclarait qu'il refuserait tout dialogue avec Israël si le gel de la colonisation de la Cisjordanie n'était pas reconduit. Le même jour, le chef d'État-major israélien sortant, Gaby Ashkenazi, était en " visite » à Bethléem, où il rencontrait des responsables des forces de sécurité palestiniennes.

La coïncidence de ces deux événements apparemment contradictoires est à l'image du décalage de plus en plus flagrant entre, d'un côté, les gesticulations diplomatiques visant à ranimer un " processus de paix » depuis longtemps mort et enterré et, de l'autre, la réalité du terrain, la poursuite de la politique expansionniste israélienne et l'intégration de plus en plus forte de l'Autorité palestinienne à l'appareil d'oppression coloniale.

Je me propose ici de tenter de dégager les grandes coordonnées de la situation dans les territoires palestiniens même si je ne prétends pas à l'exhaustivité. Il s'agit néanmoins, en replaçant les événements actuels dans leur contexte et leur historicité, en confrontant analyse des tendances lourdes et réalité du terrain, de dégager les logiques à l'œuvre côté palestinien, en se concentrant sur l'Autorité palestinienne de Ramallah et sur la gauche. Cette dernière, et notamment le FPLP, est en effet dans un processus de retour critique sur les années Oslo, consciente du cours tragique suivi par les forces issues de l'OLP. C'est ainsi que le FPLP a récemment annoncé qu'il suspendait sa participation aux réunions de la direction de l'OLP en signe de protestation contre la reprise des négociations directes par Abbas. Ce n'est pas la première fois que le FPLP prend une telle décision, mais elle est néanmoins significative.

Moins que sur cette actualité, c'est sur le sens des évolutions récentes et actuelles que je souhaite insister, en revenant dans un premier temps sur le lourd héritage des 17 années de " processus de paix ». Je tenterai ensuite d'établir les spécificités de la politique du Premier ministre de facto (2), Salam Fayyad, puis, dans un dernier temps, d'interroger les dynamiques actuelles au sein de ce qui reste du mouvement national palestinien " non-islamique » (3). Je m'inspire ici d'écrits antérieurs, en les réactualisant et en les mettant en perspective. ■

* Julien Salingue, enseignant de sciences politiques à l'Université Paris VIII, est militant du Nouveau parti anticapitaliste (France) et de la IVe Internationale.

Synthèse actualisée sur la Palestine et Israël
(® Inprecor)

notes
1. Le mandat présidentiel de Mahmoud Abbas s'est officiellement achevé en janvier 2009.

2. La liste conduite par Salam Fayyad n'avait obtenu que 2,4 % des voix lors des législatives de 2006. Les gouvernements qu'il dirige depuis juin 2007 n'ont jamais obtenu le nécessaire vote de confiance du Conseil Législatif Palestinien.

3. Il ne s'agit pas de minimiser, bien au contraire, la place du Hamas. Cette organisation reviendra régulièrement dans l'article. Néanmoins, une étude des dynamiques internes au mouvement islamique mériterait un article à part entière.