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Edwy Plenel en Martinique

© Tropiques Atrium Scène Nationale

La remarque est banale mais tellement vraie : le meilleur remerciement à faire à Edwy Plenel et à Tropiques Atrium pour cet entretien accordé au mouvement social et politique RESPÉ, dans la grande et belle salle Aimé Césaire, c’est de poursuivre la réflexion autour de quelques-uns des thèmes abordés ce 22 juillet dernier.

Les 800 personnes environ qui se sont pressées pour bénéficier de ce moment, ont certesété attirées par la notoriété du fondateur de Médiapart, par la connaissance de son lienparticulier avec la Martinique, mais savaient par la publicité faite, que ces thèmes ne seraient point marqués par la légèreté et l’insouciance.

État du monde, génocide en Palestine, colonialisme et suprémacisme, Kanaky, état de la France, égalité, féminisme, internationalisme ...Tout cela était au menu et Michèle, Marcel, Anouk, Anne-Claire, Nicole, Malou ont efficacement posé les problématiques que le public a généralement repris en y ajoutant des questions sur le journalisme.

Plutôt qu’un compte-rendu de ces deux bonnes heures d’échanges que personne n’aquittées avant la fin, complétons les notes éclairantes de Colette Césaire, dans un précédent RS, par le retour sur quelques notions importantes martelées par Edwy Plenel.

Dans le monde, les vents sont contraires

Ces vents terribles prennent leur source dans la décrépitude du capitalisme mondialisé, grand accélérateur des inégalités, des conflits et des guerres, grand porteur d’eau au fascisme, grand destructeur des écosystèmes et de la biodiversité indispensables à la vie sur la Planète. Cette réalité entre en surprenante résonance avec les mots de Césaire dans les débuts de l’expansion nazie : « Où que nous regardons, l’ombre gagne ».

« Pourtant nous sommes de ceux qui disent non à l’ombre. Nous savons que le salut du monde dépend de nous aussi. […] Ah tout l’espoir n’est pas de trop pour regarder le siècle en face » (Préface du numéro 1 de Tropiques en mars 1941).

Dire non, pour dire oui !

Le premier geste fondateur, c’est de dire NON À L’INSUPPORTABLE ! NON À L’INJUSTICE ! NON À L’OMBRE ! C’est une question de dignité, de morale, de choix déterminé et lucidepour la vie. Ce refus conditionne la possibilité d’inventer un avenir d’émancipation qui n’est pas donné d’avance dans un quelconque catéchisme.

L’illimitisme, un ennemi féroce

Dans le vocabulaire de Plenel, l’illimitisme c’est l’ADN des forces ennemies de l’émancipation humaine : celles qui ont tout, mais veulent plus : plus de profits, plus depouvoir, plus de terres, plus de jouissances effrénées, quitte à broyer les humains et àsaccager la nature. La révolte mondiale des femmes est un des cailloux salutaires dans la chaussure des Puissants.

Tenir tous les bouts à la fois

On ne peut efficacement combattre l’oppression quelque part, en la soutenant ailleurs. Ni Trump, ni Poutine, ni Netanyahou, ni Orban. L’invasion russe de l’Ukraine est un cadeau àNetanyahou. Seuls les peuples sauvent les peuples. Et pour se faire, ils doivent souvent s’opposer aux États.

La « guerre des civilisations »

Invention odieuse des suprémacistes dont la division des peuples, suivant leurs origines, leurs races, leurs religions, etc. est l’arme privilégiée.

Le « présentisme » obscurcit la pensée et sert toujours les Dominants

On appelle présentisme la méthode à la fois paresseuse et intéressée consistant à n’examiner un problème qu’en limitant son regard au présent, en refusant de mettre ceprésent en perspectives, de rechercher les causes des phénomènes, d’analyser les raisons pour lesquelles les peuples se soulèvent.

Les partis, les masses, la démocratie

Les partis politiques sont une forme incontournable d’organisation des femmes et deshommes qui veulent lutter pour un monde vivable. Sans le rapport avec la société, sansl’échange permanent, sans l’effort pour l’intervention optimale des masses, sans le respect de leur droit à l’initiative, à leur devoir de contrôle, de validation des objectifs et des stratégies, les partis deviennent plus des freins que des instruments de l’émancipation.

La fin et les moyens

Dire Non, c’est se situer d’emblée du côté des opprimé·es, de leur révolte contre toutes les injustices. Cette position de principe ne doit pas s’exonérer d’une précaution essentielle : l’examen des voies et moyens de la révolte, le souci que les moyens ne pourrissent la finpoursuivie. La barbarie ne sera jamais la réponse juste à la barbarie du camp adverse.

Ces boussoles ne donnent pas la réponse à tout et ne le prétendent pas. Nous en avons portant le plus grand besoin lorsque, comme aujourd’hui, les pendules ont tendance à s’affoler.

Merci à Edwy Plenel d’y avoir réfléchi avec nous.

Révolution socialiste n° 408 lundi 18 août 2025