Le siège de Gaza par Israël est à l’origine d’une polarisation massive de la politique britannique. Les principaux partis politiques veulent se rapprocher d’Israël, tandis que des centaines de milliers de personnes défilent dans les rues en criant « Palestine libre ».
Tous les politiciens de haut rang parlent du « droit d’Israël à se défendre ». Le Premier ministre conservateur Sunak était impatient de suivre Biden en Israël. Et il n’y a pas un papier à cigarette qui le sépare de Sir Keir Starmer – officiellement chef, travailliste, de l’opposition mais qui devrait prendre la place de Sunak d’ici un an – sur cette question.
Mais il y a des remous au sein du parti travailliste. Starmer a déclaré qu’Israël « a le droit » de priver Gaza d’eau et d’électricité et une note a été envoyée pour interdire aux représentants élus de participer à des manifestations, de peur apparemment qu’ils ne soient vus avec des partisans du Hamas. Les partis locaux ne sont pas autorisés à porter des banderoles lors des marches et leur droit de dénoncer les violations du droit international par Israël en débattant des résolutions est fortement limité. Cette situation a suscité l’indignation à tous les niveaux du parti.
Une série de politiciens travaillistes de haut rang ont pris leurs distances avec la position de Starmer, notamment les dirigeants des travaillistes écossais et gallois, les maires travaillistes du West Yorkshire, du Grand Manchester et de Londres, ainsi que treize membres du cabinet fantôme. Environ un quart des député·es travaillistes ont signé une motion parlementaire appelant à un cessez-le-feu, des dizaines de conseiller·es travaillistes ont démissionné du parti par colère contre la position des dirigeants, tandis que plusieurs centaines d’entre eux auraient signé une lettre ouverte appelant à un réexamen de la situation.
Il s’agit du plus grand schisme au sein du Parti travailliste depuis la guerre en Irak, y compris pour ceux qui ne sont pas du tout à gauche, comme Anas Sarwar, le chef du Parti travailliste écossais, et ont l’impression que Starmer ne tient pas compte du sentiment populaire.
Mais alors que la plupart des responsables politiques tentent de se rapprocher de Netanyahou et de l’establishment sioniste, ils semblent insensibles à l’opinion publique qui possède un point de vue très différent : un rejet écrasant de la punition collective des Palestiniens, résumée dans le soutien à un cessez-le-feu – 76 % des Britanniques disent qu’il devrait y avoir un cessez-le-feu immédiat et 8 % seulement ne sont pas d’accord.
La Palestine bénéficie également d’un soutien plus actif : dans toute l’Écosse, le Pays de Galles et l’Angleterre, dans les grandes villes comme dans les plus petites, des marches et des veillées ont été organisées pour réclamer la fin du blocus et affirmer que la punition collective du peuple palestinien doit cesser. Plus de 150 000 personnes ont défilé à Londres le 14 octobre, soit plus que pour toute autre thématique internationale depuis la guerre d’Irak. Le 21 octobre, 300 000 personnes ont envahi les rues de Londres lors de la plus grande manifestation pro-palestinienne de l’histoire britannique. Le 28 octobre a surpassé cette démonstration phénoménale de solidarité, avec 500 000 personnes présentes lors d’une marche gigantesque.
Ces mobilisations ont été majoritairement jeunes et diverses en termes de genre et de race. La gauche radicale a été visible, mais la majorité des participant·es semble s’être mobilisée par l’intermédiaire d’organisations communautaires ou des réseaux sociaux – les pancartes fabriquées à la main étant plus visibles que celles imprimées par des organisations existantes. De nombreuses mosquées ont encouragé les gens à manifester.
Des contingents importants et bruyants de juifs·ves ont participé à toutes ces manifestations, issus de groupes et d’horizons différents, tou·tes affirmant que les crimes de guerre de Netanyahou ne sont pas commis en leur nom. Cette semaine, deux manifestations ont été organisées par des groupes juifs devant la résidence des ambassadeurs d’Israël, tandis que l’occupation d’une grande gare londonienne, le 28 octobre, a bénéficié d’une participation juive très importante.
Même dans l’horreur de ce qui se passe à Gaza – et la violence croissante contre les Palestiniens en Cisjordanie de la part de colons armés jusqu’aux dents par les forces de défense israéliennes – les messages que nous recevons des Palestinien·nes déterminé·nes à ne pas vivre une seconde Nakba quant à l’importance de notre mouvement de solidarité nous donnent la conviction de continuer, non seulement d’être dans les rues pour crier Free Palestine, mais aussi de construire le mouvement de Boycott, désinvestissement et sanctions sur la longue durée.