Les problèmes se multiplient également au sein du Parti Populaire (PP) de droite : Isabel Díaz Ayuso a surgi de nulle part en tant que dirigeante face au secrétaire général du PP, Pablo Casado, qui, à son tour, tente de tirer profit de la victoire à Madrid. Ayuso est un produit de marketing politique qui a créé une " marque » faisant pencher l'équilibre interne du PP vers des positions plus néolibérales et plus droitières. Cela peut être un inconvénient pour aspirer à gouverner le pays dans son ensemble. Cela dit, les résultats obtenus à Madrid - compte tenu des caractéristiques politiques, économiques et sociales spécifiques de la région - ne peuvent être mécaniquement extrapolés à l'ensemble de l'État espagnol. Mais, incontestablement, le " gouvernement de progrès » de Pedro Sánchez, formé par le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) et Unidas Podemos, vient de recevoir un coup dur.
Plus grave encore, le résultat électoral est une très mauvaise nouvelle pour les classes subalternes, pour les travailleuses et les travailleurs, bref, pour le peuple de gauche. Le néolibéralisme trumpiste madrilène a revalidé et amélioré son résultat électoral dans un contexte social critique. La situation sanitaire et économique créée par la pandémie s'est ajoutée aux antécédents, configurant un profond " état de malaise » qui traverse l'ensemble de la société dans l'État espagnol, comme c'est le cas dans de nombreux autres pays.
Une situation dramatique
Dans le cas espagnol, ce malaise est aggravé pour une classe ouvrière qui souffre d'un chômage - selon les données officielles, bien qu'en réalité le taux soit plus élevé - frappant 3 949 640 salariéÃes en mars 2021, ce qui représente 15,3 % de la population active. Dans la tranche d'âge des moins de 25 ans, le taux atteint 37 %. Dans le même temps, le nombre de salariéÃeÃs bénéficiant, pendant la crise du covid, des mesures de chômage partiel (ERTE) à la charge des caisses publiques a atteint le chiffre de 638 283 personnes à la fin du mois d'avril 2021. Les " queues de la faim » devant les cantines publiques, privées et populaires, sont une réalité douloureuse. Or, les mesures du " bouclier social » du gouvernement de Pedro Sánchez - comme le misérable revenu minimum d'existence créé pour les cas extrêmes - n'arrivent pas, sont retardées et sont en tout cas insuffisantes. La structure économique espagnole, avec un secteur des services touristiques qui représentait près de 13 % du PIB en 2019, avant le Covid-19, et un nombre de bars, brasseries et restaurants disproportionné par rapport à la population autochtone, a durement souffert des effets de la pandémie.
Dans ces conditions, le gouvernement espagnol, avec une augmentation de la dette publique approchant les 130 % du PIB, mise tout sur l'arrivée des Fonds de relance de l'Union européenne (NextGenerationEU). Cela signifie qu'il mettra ces prêts et subventions entre les mains des grandes entreprises, sans renforcer le secteur public de l'économie. Le gouvernement de coalition PSOE-Unidas Podemos maintient une politique économique néolibérale - dirigée par la ministre de l'Économie Nadia Calvi±o [antérieurement, elle a occupé les plus hautes fonctions dans l'administration de l'UE] - qui n'envisage pas une réforme budgétaire avec une volonté redistributive afin de doter le secteur public de moyens suffisants. Le gouvernement aborde les problèmes sociaux à partir d'une logique d'assistance qui ne cherche qu'à pallier faiblement (et sans y parvenir) les aspects les plus déchirants de la pauvreté.
En bref, les classes populaires ne voient pas de solution de gauche à l'horizon. Et dans le même temps, s'accroissent les inégalités entre le capital et le travail, entre les riches et les pauvres, entre les travailleurs ayant un emploi dit décent et ceux ayant un emploi précaire, entre les hommes et les femmes, entre les plus de 35 ans et les moins de 35 ans, entre les habitants des grands centres financiers et les habitants des régions en difficulté. Comme dans les pays appauvris - en tenant compte évidemment des différences - il y a de larges couches de la population qui ont été confrontées au dilemme de tomber malade à cause du Covid-19 ou de tomber malade à cause du manque de revenus. Voilà la clé pour comprendre l'état d'esprit et la conscience populaire.
Cette situation objective des classes populaires s'accompagne d'un facteur très négatif : la démobilisation et la passivité face à la situation. Les grandes centrales syndicales pratiquent une politique de " dialogue social » avec les patrons qui détériore chaque jour leur position dans les rapports de forces. Et malgré les discours, les syndicats n'ont pas contraint le gouvernement à maintenir le montant des pensions de retraite, à augmenter le salaire minimum professionnel comme promis, ni à abroger la législation du travail qui a retiré beaucoup de droits aux salariéÃes et enlevé aux syndicats les possibilités de négociation collective efficace. Il existe certes des luttes défensives et éparses dans des entreprises menacées de fermeture et des poches de résistance sociale pour le droit au logement ou à la santé publique. Toutefois, nous sommes loin du temps des mobilisations des années 2011 à 2015 avec les " marées » (blanche des personnels de santé, verte des enseignantÃeÃs, etc.) qui ont fait descendre des dizaines de milliers de personnes dans la rue.
Une grande partie des militantÃes des mouvements sociaux ont gravité autour des gouvernements régionaux de gauche et surtout du gouvernement de coalition espagnol. Nombre de leurs composantes ont été captées d'une manière ou d'une autre par l'appareil gouvernemental et les tâches institutionnelles. Le résultat est qu'une part importante des énergies des associations de quartier, pour le logement, l'environnement, les luttes des femmes ou les mouvements antiracistes a diminué au profit d'un attentisme face à une action législative gouvernementale qui tarde à venir et qui, finalement, n'arrive pas - brisant de la sorte les promesses et créant le découragement. Et le cycle des mobilisations pour les droits nationaux en Catalogne est, pour le moment, entré dans une phase de régression. La première conclusion que l'on peut tirer est que le cycle politique ouvert après le 15M de 2011 a pris fin. Nous sommes confrontéÃes à une nouvelle phase d'organisation populaire dans un contexte plus dégradé qu'avant la formation du gouvernement de coalition PSOE-Unidas Podemos.
Résultats électoraux et premiers éléments d'analyse
Les élections du 4 mai ont eu lieu avant que le mandat de quatre ans n'ait pris fin, et le parlement a donc eu une durée de moins de deux ans. La cause de la dissolution de la chambre par la présidente Isabel Diaz Ayuso du PP est une manœuvre pour profiter d'un renforcement de son prestige après une rocambolesque manœuvre politique du PSOE dans une autre région (Murcia), épisode qui ne mérite pas d'être décrit maintenant si ce n'est pour signaler que Pedro Sánchez, président du gouvernement espagnol et secrétaire général du PSOE, fonde actuellement ses opérations politiques sur les conseils d'Ivan Redondo [directeur du cabinet de Sánchez depuis juin 2018] - un Raspoutine du XXIe siècle, un consultant électoral et en communication, un mercenaire qui a travaillé comme " technicien » pour différents partis.
Le Parti populaire (PP) a obtenu un excellent résultat avec 65 des 136 sièges qui composent la chambre. Il dépasse l'ensemble des sièges de la gauche qui en totalise 58. Avec 65 sièges ajoutés aux 13 obtenus par l'extrême droite Vox, l'extrême droite et la droite extrême disposent de 78 sièges, soit 20 de plus que la somme de ceux de la gauche. Avec un taux de participation record dans ce type d'élection, 76,2 % de l'électorat - facteur qui devrait théoriquement profiter aux options de gauche - la droite a obtenu 57 % du vote populaire contre 42 % qui est allé à la gauche. Une catastrophe totale.
Le PP dirigeait le gouvernement de Madrid depuis plus de deux décennies, mais le 4 mai, il a été le parti avec le plus de votes dans toutes les villes (sauf dans deux petites municipalités marginales) de la région et dans toutes les circonscriptions électorales de la ville de Madrid, y compris les quartiers et les villes de la " ceinture rouge ». Le tableau suivant est significatif :
Résultats des élections du 4 mai 2021 de l'Assemblée de Madrid
Parti | Suffrages 2021 | sièges 2021 | sièges 2019 |
---|---|---|---|
Vox | 333 403 | 13 | 12 |
Parti populaire | 1 631 608 | 65 | 30 |
Ciudadanos | 130 237 | 0 | 26 |
Parti socialiste | 612 622 | 24 | 37 |
Mas Madrid | 619 215 | 24 | 20 |
Unidas Podemos | 263 871 | 10 | 7 |
Il est clair que le discours trumpiste " à la texane » [opposé au confinement, sous diverses formes] de la présidente Díaz Ayuso, dans lequel le profit des entreprises prend le pas sur la santé des gens, est soutenu par de larges secteurs de la société. Il y a bien sûr les secteurs patronaux qui en profitent, mais en même temps il y a des classes moyennes dans lesquelles a progressé une conception peu solidaire de la liberté de consommer et de circuler. Et, ce qui est plus grave, il y a de nombreux travailleurs et travailleuses avec des emplois très précaires et de bas revenus menacés qui ont été confrontés au dilemme du choix entre deux risques : la santé ou la faim.
Il fut surprenant qu'Ayuso commence sa campagne en posant l'alternative " socialisme ou liberté » qu'elle a ensuite transformé en dichotomie : " communisme ou Ayuso ». Il était surprenant d'entendre des milliers de personnes crier le slogan " Liberté » devant le siège du PP après le triomphe dans les urnes. C'est une expression politiquement vide, mais elle manifeste un sentiment individualiste qui identifie la liberté à la " liberté » personnelle d'accès aux commerces et aux loisirs. Comme dans tout bon " moment » trumpiste, les chiffres réels de l'économie et de la santé n'ont pas d'importance. Ayuso a produit une réalité parallèle qui a imprégné les secteurs populaires.
Malgré une gestion économique et pandémique très négative, Ayuso a atteint trois objectifs, aidée par la plupart des médias et soutenue par un parti très organisé et ses bases sociales dans l'Église catholique, les écoles privées subventionnées par l'argent public et les entreprises bénéficiant de la privatisation des soins de santé. Tout d'abord, elle a imposé ses " vérités » au moyen de mensonges et contre toute velléité de véracité. Ensuite, elle a créé l'illusion d'un " mode de vie à la madrilène » (aussi grotesque que cela puisse paraître) dont l'identité est attaquée par le gouvernement espagnol (sic). Enfin, et surtout, elle a fixé le cadre dans lequel le débat politique, la campagne et les questions clés devaient se dérouler tout en veillant à ce qu'ils ne soient pas à l'échelle régionale mais espagnole. Il est vrai que cette option camoufle la réalité d'une région dans laquelle les entreprises de construction (tant les travaux publics que l'immobilier) ont reçu d'importants privilèges et injections d'argent de la part du pouvoir politique. Un réseau d'intérêts s'est créé autour de l'éducation et de la santé privées, fortement soutenues au détriment de leurs homologues publiques entraînées dans un processus de détérioration et de destruction.
Le triomphe du PP est complété par un résultat significatif pour le parti d'extrême droite Vox, dirigé par un parasite des subventions publiques, Santiago Abascal - dont on sait qu'il n'a jamais travaillé auparavant - et Rocío Monasterio, une femme d'affaires ayant des antécédents de fraude dans l'exercice de sa profession. Vox s'affirme comme un disciple de Steve Bannon et est composé d'une combinaison explosive de néolibéraux autoritaires, de nostalgiques franquistes, de membres des classes rentières parasites, de la police et de l'armée, et de voyous de salles de musculation.
Vox et PP ont tous deux exprimé leur intention de collaborer. Avec la disparition de Ciudadanos - un parti néolibéral qui se targuait d'être centriste - du parlement de Madrid et dont les ex-votants ont nourri le résultat du PP, la droite nationaliste espagnole a été reconfigurée. Cela aura des effets dans d'autres régions comme l'Andalousie où le PP et Ciudadanos co-gouvernent. Mais il ne fait aucun doute que, si Vox représente un danger potentiel qui conditionne déjà les débats culturels et les politiques sur certaines questions, le véritable danger explosif et toxique est déjà posé par le néolibéralisme autoritaire (" libertarien ») du PP de Madrid. Comme dans une meute de chiens de chasse, il y a ceux qui aboient et ceux qui mordent : Monasterio vocifère et Ayuso, entre une phrase stupide et une phrase idiote, promeut des politiques réactionnaires efficaces, matérielles et idéologiques.
Un chapitre spécial serait nécessaire pour dire comment, pendant des années, tout le spectre de la droite espagnole, dans ses différentes versions, ainsi que les médias qui y sont liés, ont concentré sur la personne de Pablo Iglesias toute leur haine en tant que classe dirigeante issue de la guerre civile, faisant de lui l'objet d'un harcèlement personnel, familial, médiatique et judiciaire. Un harcèlement qui, pendant la campagne électorale, a atteint le stade des menaces de mort de type mafieux, qui se sont étendues à d'autres membres du gouvernement espagnol. Cette campagne ne peut être décrite que comme abominable et dangereuse.
Reconfiguration au sein de la gauche
Le Parti socialiste a obtenu ses pires résultats électoraux à Madrid depuis 1977. Faute de projet, son candidat, â´ngel Gabilondo, a fait des déclarations suicidaires comme celle de ne pas augmenter les impôts, dans une région dont les recettes fiscales ont diminué de dizaines de milliards d'euros à cause des gouvernements PP, ou encore comme celle de ne pas adopter, dans la lutte contre la pandémie, des mesures préventives différentes de celles adoptées par Ayuso, telles que la fermeture de l'hôtellerie et de la restauration. Avec cela, â´ngel Gabilondo et son patron Pedro Sánchez essayaient de gagner l'électorat centriste, un objectif qu'ils n'ont pas atteint (1).
Más Madrid, un groupe issu de ce qui était initialement Podemos, qui se définit comme vert et féministe - mais qui était même prêt à gouverner avec un parti comme Ciudadanos et qui a un bilan de quatre ans de travail municipal avec de nombreuses ombres en matière d'urbanisme - a réussi à dépasser le parti socialiste de plus de 6 000 voix, ce qui le place comme premier parti de la gauche traditionnelle. Sa campagne a été intelligente et sa candidate Mónica García - une médecin qui continue à travailler dans son hôpital et qui a été presque la seule voix de l'opposition au cours des deux années précédentes dans le parlement de Madrid - a fait passer un message clair sur des questions concrètes ayant trait à la santé et à la santé publique, par exemple. Des propositions qui ont trouvé un écho dans l'électorat de gauche. Mais son orientation politique et programmatique - d'un vert libéral social-démocrate qui cherche son profil dans l'image donnée par les Grünen allemands - souligne également les limites de Más Madrid à se façonner comme une gauche alternative écologique et socialiste capable de changer substantiellement la situation des secteurs populaires.
Le cas de Unidas Podemos (UP) est particulièrement important parce qu'il représente ce qui reste du souffle rénovateur et enthousiasmant qu'était le premier Podemos de 2015, à la création duquel Anticapitalistas a contribué de manière décisive et dans lequel il a travaillé jusqu'à ce que les conditions antidémocratiques internes l'en empêchent. La coalition UP qui, lors des élections précédentes, avait obtenu 7 sièges et qui, cette fois, en a obtenu 10, a cependant un résultat qui, du point de vue politique, signifie un nouvel échec. Cela a conduit son leader Pablo Iglesias à démissionner de tous ses postes internes et institutionnels. Iglesias était la figure caudilliste brillante qui a fait irruption sur la scène politique espagnole en 2015. Toutefois, dans sa force se cachait sa faiblesse. En l'absence d'un projet politique ayant un horizon stratégique, il a configuré un parti, Podemos, dans lequel il détenait le premier et le dernier mot. Ce qui signifie qu'il a procédé à une exclusion systématique de toute position différente, mais a également rendu impossible la création d'une structure de parti démocratique et participative, dotée de liens organiques solides avec la classe ouvrière. Il a utilisé toutes ses forces pour entrer au gouvernement de Pedro Sánchez. Ce pari est loin d'avoir renforcé la position de Podemos, qui a vécu un processus de subordination aux politiques sociales libérales. Construit autour d'une contestation du régime né en 1978, Podemos a fini par devenir un défenseur de la Constitution espagnole de 1978, cantonnant ses réserves face à la monarchie aux déclarations et aux discours.
Après son échec au gouvernement, Pablo Iglesias, craignant que son parti ne dépasse pas le seuil des 5 % des votes à Madrid, a démissionné de son poste de ministre du gouvernement espagnol et de vice-président de Sánchez. Il a donc dirigé la candidature de Unidas Podemos aux élections avec l'intention de surmonter les mauvaises prédictions des sondages. Il envisageait pouvoir déterminer la politique de la gauche à Madrid en faisant partie d'un gouvernement régional. Pendant la campagne, il a concentré ses efforts sur la polarisation du débat avec Ayuso et Vox, en posant l'alternative " fascisme ou démocratie », avec une approche de front populaire qui cachait une orientation eurocommuniste enveloppée dans la recherche de la vieille identité stalinienne de la guerre civile espagnole et une rhétorique qui ne correspondait pas aux préoccupations ni aux dilemmes qui se présentaient à la majorité sociale, ni à la situation réelle si différente de celle de l'Europe des années 1930. Et, ce qui est encore plus ridicule, cette orientation fondait la réponse antifasciste sur la Constitution de 1978. C'est-à-dire un produit du pacte entre franquistes et réformistes qui garantit la direction de l'État à un héritier (Felipe VI) du roi nommé par Franco (Juan Carlos), protège l'économie de marché, facilite les privilèges éducatifs et économiques de l'Église catholique, empêche le droit à l'autodétermination et à la souveraineté des nations et confère à l'armée le rôle de garant de l'unité de l'Espagne.
Podemos, Izquierda Unida et le Parti communiste espagnol (PCE) forment actuellement un amalgame " post-communiste » confus avec le logo UP entièrement aux mains de Pablo Iglesias. Unidad Podemos est dépourvu de muscle militant et de projet politique propre face au PSOE. Ce dernier épisode - la démission de tous ses postes par Pablo Iglesias - laisse son parti, Podemos, dans une crise interne profonde et de grande ampleur et face à des règlements de comptes dont les conséquences sont imprévisibles. Une crise qui sera sans doute transférée à l'ensemble de l'UP - la coalition entre Podemos et Izquierda Unida (qui est une coalition). Mais la démission d'Iglesias est, avant tout, l'expression de l'échec d'une orientation populiste sans programme ni proposition de société, d'une action basée sur l'hyper-leadership caudilliste et d'un modèle de parti antidémocratique. Et surtout, elle montre l'échec du gouvernisme, cette vieille obsession de l'eurocommunisme de faire partie des cabinets ministériels comme condition sine qua non de survie.
Une dernière considération. La gauche marxiste révolutionnaire a également d'importants problèmes à résoudre dont le premier, et non le moindre, est sa faible influence sociale, politique et électorale. Elle a l'obligation de se réinventer. Un cycle politique s'est terminé mais les tâches à venir sont plus complexes qu'au début de celui-ci, car elles devront combiner un patient travail de reconstruction des organisations populaires et de la résistance sociale, l'élaboration d'un nouveau programme écosocialiste, la construction d'un pôle politique anticapitaliste solide et l'établissement de nouvelles alliances sociales et politiques, y compris des expériences électorales qui lui permettent de jouer un rôle actif dans la recomposition du mouvement et l'empêchent de tomber dans l'insignifiance. Mais nous pouvons laisser cette question pour un autre article de réflexion sur l'avenir.
Madrid, 5 mai 2021
* Manuel Garí Ramos est membre du collectif de direction d'Anticapitalistas (section de la IVe Internationale dans l'État espagnol) et du Comité consultatif de la revue Viento Sur. Cet article a été d'abord publié en castillan sur le site web de la la revue Viento Sur (https://vientosur.info/la-izquierda-derrotada-en-madrid-cronica-de-urgencia/) et en traduction française par la revue suisse en ligne À l'Encontre (http://alencontre.org/europe/espagne/etat-espagnol-4-mai-a-madrid-la-gauche-vaincue-chronique-dune-actualite.html)
Rappel de faits marquants en 2020-2021 (Inprecor)
2020
Selon des rapports gouvernementaux, compte tenu du vieillissement de la population, l'Espagne aurait besoin de l'arrivée de 270.000 migrants par an d'ici 2050 pour contrer la diminution du nombre d'actifs.
Le 1er janvier, le gouvernement de coalition formé par le Parti socialiste de Pedro Sanchez et Podemos, augmente les retraites de 0,9 %. Cette augmentation concerne 11 millions de retraités et correspond à une augmentation de 9 € par mois. La retraite moyenne en Espagne s'élève à 966 €. Depuis 2014 l'augmentation des retraites était bloquée à 0,25 % suite aux mesures d'austérité décidées par le gouvernement conservateur de Mariano Rajoy. Pour le FMI, cette mesure n'est pas soutenable en raison de la générosité des versements et du vieillissement de la population. l'âge réel de départ à la retraite est à 64 ans, l'âge légal est à 65 ans. L'âge légal de départ à la retraite doit atteindre 67 ans en 2027.
La sécurité sociale espagnole accuse un déficit de plus de 17 milliards d'euros.
Le 14 mars, Etat d'urgence sanitaire.
Le 28 mars, Anticapalistas quitte Podemos.
Le 16 mars, l'Espagne ferme ses frontières terrestres. Les hôpitaux sont débordés. Madrid est le principal foyer de l'épidémie. Etat d'alerte sanitaire jusqu'au 24 mai.
En décembre, loi de régulation de l'euthanasie.
En raison de la crise sanitaire, l'économie est aux abois en l'absence de tourisme et de corridas. Les aides apportées sont faibles. Les cafés et restaurants fermés n'ont aucune aide et des emplois disparaissent.
La gauche au pouvoir perd beaucoup de crédit à cause de la crise sanitaire.
Vox, le parti d'extrême droite tente de surfer sur cette vague de mécontentement. Il se veut patriotique, antiféministe et promet d'endiguer l'immigration illégale. Ses électeurs sont issus des classes moyennes en régression et des classes ouvrières appauvries.
2021
Les expulsions de logements sont toujours un fléau en Espagne. grâce aux militants, des milliers d'expulsions sont bloquées.
Le 14 février, élections catalanes. Effondrement de Ciudadanos (5,6 %).
La question catalane divise toujours.
Podemos est en crise.
En mai, élections régionales.
Après la défaite électorale, Pablo Iglesias décide d'abandonner la vie politique.
1. Le 7 mai, le secrétaire général du PSOE pour Madrid et candidat aux élections, â´ngel Gabilondo, a démissionné, ce qui témoigne de la situation au sein de la direction du PSOE.