Chronologie de la Grèce 1950-1989
Après une aventureuse expédition en mer sur un bateau à rames, Théo arrive en Turquie, et, suite à un bref séjour dans ce pays, tente de se réfugier en Bulgarie. Il fut cependant incarcéré par les autorités bulgares - c'est-à-dire la bureaucratie stalinienne - qui ont livré, sans états d'âme, ce dangereux trotskiste aux policiers grecs… Lors de son procès en Grèce, le juge militaire a ironisé sur les " frères communistes bulgares » qui l'avaient trahi, s'attirant cette réponse cinglante de Psaradellis : " Cette affaire ne vous concerne pas. Un jour les travailleurs bulgares régleront leur compte aux staliniens de leur pays ».
Condamné par les tribunaux de la junte, incarcéré, Théo s'évade une deuxième fois ! Après avoir traversé les Balkans (en évitant la Bulgarie...) et l'Italie - où il sera pris en charge par notre camarade Livio Maitan - il s'exile en France en 1971. À Paris, il milite avec les exilés grecs contre la dictature et travaille à l'imprimerie du journal Rouge. Il participe aussi aux activités de la Ligue communiste révolutionnaire, où il fera la connaissance d'une camarade yougoslave parlant grec, Nadia, qui deviendra son épouse et la mère de ses deux enfants.
De retour en Grèce en 1974, après la chute des colonels, Théo milite à nouveau dans l'OKDE (Organisation communiste internationaliste de Grèce, IVe Internationale) jusque vers la fin des années 1990, quand, après une grave opération du cœur, Théo abandonne le militantisme actif.
Cependant, le 18 juillet 2002, lors de la campagne policière de chasse au " Mouvement 17 Novembre », Théo fut arrêté et dénoncé comme membre de ce groupe par des " repentis », qui finiront, plus tard, par se rétracter publiquement. Il fut incarcéré jusqu'à son nouveau (dernier) procès commencé le 3 mars 2003, qui eu un considérable retentissement international.
Dans sa déposition, Théo réfuta les accusations policières et nia toute participation dans un groupe dont il ne partageait pas l'orientation nationaliste, et encore moins les méthodes - l'exécution de députés, d'industriels, de journalistes de droite, de diplomates turcs… Il reconnut par contre avoir participé à l'attaque d'une banque en 1986 - un délit qui était déjà prescrit - et qui heureusement ne fit ni blessé ni mort. Mais pourquoi donc s'être lancé dans une telle action, douze années après la fin du régime des colonels ?
Psaradellis expliqua que son objectif avait été de récupérer de l'argent pour financer la publication - en attente depuis des années - des œuvres de Pandelis Pouliopolos, le fondateur du trotskisme grec… sans en avertir la section. Mais il n'a reçu aucune somme et - réalisant le rôle du 17 Novembre dans cette opération - coupa tous les ponts avec elle.
Ceux et celles qui connaissent Théo et ont milité à ses côtés reconnaîtront dans ce mélange de crédulité et d'honnêteté politique ce lithographe qui, comme d'autres ouvriers grecs de sa génération et de sa tradition politiques vouait une véritable vénération à la culture en général, et à l'héritage politique du marxisme révolutionnaire en particulier. Une vénération d'autant plus grande qu'il avait dû arrêter ses études à l'école primaire.
Certes, on peut considérer qu'il a fait preuve d'imprudence, de naïveté et d'un jugement politique erroné. Rappelons, comme circonstance atténuante, la célèbre phrase de Brecht dans l'Opéra de quat'sous : " voler une banque n'est rien comparé à … fonder une banque ».
" Mon idéologie, a-t-il déclaré, ne m'interdit pas les expropriations de banques, mais elle condamne, politiquement et moralement, les assassinats d'adversaires politiques. »
Nous étions parmi les nombreux témoins de la défense, grecs et français, venus à son procès pour expliquer les actions de Psaradellis, et montrer l'incompatibilité entre sa culture politique et des pratiques meurtrières. Des nombreuses personnalités politiques, en Grèce et dans le monde entier, ont signé un appel pour sa libération. Ce fut un grand moment de chaleur humaine. Finalement, le tribunal a reconnu son innocence, et il fut relaxé.
Cher Théo, cher ami et camarade, tu as encore une fois réussi ton évasion… Mais cette fois-ci nous ne pourrons plus t'accueillir et rire avec toi et avec tes proches qui t'ont tant soutenu et aimé.
Mais nous ne t'oublierons pas et nous sommes de tout cœur auprès de Nadia, Marianna et Statis.