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États-Unis : À la Cour suprême, réaction et corruption

par Dan La Botz
Wikimedia commons

La Cour suprême des États-Unis (SCOTUS), la plus conservatrice depuis 80 ans, s’est totalement discréditée aux yeux de beaucoup d’AméricainEs par ses décisions antidémocratiques. Mais aussi la corruption de certains juges et l’identification de certains d’entre eux avec l’insurrection d’extrême droite et la tentative de coup d’État du 6 janvier 2021.

La Cour suprême a toujours été composée en majeure partie de personnes issues de la classe dirigeante ou de son élite politique, mais cela faisait des décennies qu’elle n’était pas apparue aussi clairement partiale. Aujourd’hui, 60 % des AméricainEs disent désapprouver la Cour et beaucoup la méprisent totalement.

Les juges de la SCOTUS, qui siègent à vie, sont nommés par le président avec l’approbation du Sénat, une institution très peu démocratique qui tend à refléter d’abord les intérêts de la classe dirigeante. De la fin des années 1930 aux années 1960, des présidents démocrates – Franklin D. Roosevelt, Harry Truman, John F. Kennedy et Lyndon B. Johnson – ont pu nommer la plupart des juges, conférant à la Cour un caractère libéral. Au cours de ces années, certains droits des travailleurEs, des NoirEs et des femmes ont été renforcés et étendus. Avec la fin de l’expansion économique de l’après-guerre, la Cour est devenue plus conservatrice à partir des années 1980 et une cour de droite dans les années 2000.

L’orientation de la Cour suprême de plus en plus à droite

Les neuf juges de la SCOTUS reflètent le pays en termes de race, de religion et de sexe : six sont blancs, deux sont noirs, une est latina et deux sont juifs, ce qui en fait peut-être la cour la plus diversifiée de l’histoire des États-Unis. Mais c’est aujourd’hui la cour la plus conservatrice depuis quatre décennies, dominée par des membres nommés par les Républicains et qui ont adopté des décisions de plus en plus réactionnaires. Le président républicain George H. W. Bush a nommé le juge Clarence Thomas et George W. Bush a choisi le juge en chef John Roberts ainsi que Samuel A. Alito, tandis que Donald Trump en a nommé trois, Neil Gorsuch, Brett Kavanaugh et Amy Coney Barrett. La droite dispose désormais d’une majorité de six contre trois, ce qui a complètement modifié l’orientation de la Cour.

La décision la plus importante de la Cour a été l’affaire Dobbs vs. Jackson Women’s Health Organization of 2022, qui a renversé Roe vs. Wade, l’arrêt de 1973 de la SCOTUS qui avait établi le droit constitutionnel des femmes à l’avortement. Mais dans d’autres décisions, la Cour a également défait des lois sur la discrimination raciale, sapé la protection du droit de vote, compromis la séparation de l’Église et de l’État, affaibli des agences fédérales de régulation et miné des lois sur le contrôle des armes à feu.

Corruption

Dans le même temps, a été révélée une grave corruption au sein de la Cour. Le juge Clarence Thomas a accepté des cadeaux financiers du milliardaire et donateur républicain Harlan Crow. Celui-ci a payé l’éducation en école privée du petit-neveu et du fils adoptif de Thomas, la maison où vivait la mère de Thomas, de nombreux voyages de vacances pour Thomas dans les jets et yachts privés de Crow ; il a donné un demi-million de dollars à l’épouse de Thomas, Ginni, pour sa fondation politique de droite et lui a versé un salaire annuel de 120 000 dollars. Ginni Thomas soutient le mouvement « Stop the steal » (« Arrêtez le vol ») de Trump qui prétend, faussement, que celui-ci a gagné la dernière élection présidentielle. Le juge Alito, lui, a accepté un voyage pour pêcher en Alaska d’une valeur de 100 000 dollars de la part du gestionnaire de fonds spéculatifs Paul Singer. Crow et Singer sont tous deux des hommes dont les affaires ont été portées devant la Cour, et ni Thomas ni Alito n’ont signalé leurs cadeaux ou se sont excusés.

On vient d’apprendre qu’Alito a fait flotter des drapeaux associés à l’expression « Arrêtez le vol » de Donald Trump et à l’insurrection du 6 janvier, l’un étant un drapeau américain renversé à son domicile et l’autre un drapeau nationaliste chrétien « Appel au ciel » dans sa maison de vacances. Au sein de la plus haute juridiction du pays, nous avons donc deux juges corrompus, tous deux liés à l’extrême droite, six conservateurs au total qui annulent des réglementations et des lois décidées démocratiquement au niveau des États et au niveau fédéral. Il n’est pas étonnant que la Cour soit désormais méprisée par tant de gens.

Dan La Botz, traduction Henri Wilno, publié par l’Anticapitaliste le 27 mai 2024.

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