La crise de l'État yougoslave est globale. Comme dans les autres pays dits socialistes, elle touche aux équipes gouvernementales, aux institutions de l'État et aux rapports de production sur propriété. Elle a ses rythmes et ses formes propres et montre des différenciations selon les républiques ; elle est, en outre, fortement percutée par la guerre qui a accéléré l'éclatement de l'ancienne f.d.ration. Au cours de son dernier voyage en Yougoslavie, notamment en Slov.nie, Catherine Samary a pu faire le point sur le mouvement syndical, ainsi que sur les débats actuellement en cours sur les réformes économiques et surtout sur la propri.t. et les projets de privatisation qui, en Yougoslavie, prennent une forme particuli.re du fait de la place de l'autogestion dans la Constitution. Laboré par Tito.
Contrairement à l’ancienne Union soviétique, le gouvernement fédéral, confronté depuis le début de la décennie 80 à la gestion d’une dette majeure, a été plus tôt que les pouvoirs républicains eux-mêmes dominé par une orientation libérale.
Le gouvernement d’Ante Markovic représentait l’instrument direct d’un projet restaurationniste à l’échelle de la fédération, selon une logique recentralisatrice soutenue par les créditeurs, le Fonds monétaire internationale (FMI) en premier lieu. Son orientation était par essence non nationaliste, ouverte au capital étranger et à l’insertion dans le marché mondial et l’Europe libérale. Elle s’est heurtée de front à la montée des pouvoirs républicains (y compris libéraux) dans un contexte de crise économique et d’inégalités de développement poussant les plus riches à se défaire du “fardeau” des autres (volontiers caractérisés comme “incapables”, “non civilisés”, bref, “indignes” de l’Europe). La montée du nationalisme serbe a renforcé les craintes des républiques non serbes à l’égard de tout projet “yougoslave”. La guerre a achevé de formaliser l’éclatement de l’ancienne fédération. Le gouvernement Markovic ne pouvait y survivre.
Les changements essentiels s’opèreront donc désormais au plan républicain. C’est à ce niveau que se jouera la transformation des institutions étatiques et des lois de la transition vers une “économie de marché”. Mais les programmes des équipes venues au pouvoir lors des premières élections pluralistes de 1989-1990 avaient le flou des débuts “post-communistes”.
Républiques riches et républiques pauvres
Les dimensions nationalistes l’ont partout emporté sur toute autre valeur. Cependant, les contextes, les dynamiques et les résultats n’étaient pas les mêmes : certes l’Europe des riches est attirante pour tous les peuples. Chacun s’en réclame et tous veulent faire appel au marché et à la propriété privée. Mais, les chances de s’insérer dans le monde capitaliste ou d’en recevoir les capitaux ne sont pas égales. Dès lors, l’éclatement en Etats / nations sera ici (chez les plus riches) dominé par la volonté d’insertion plus rapide, alors que chez d’autres (les plus pauvres) il y aura des résistances (“populistes” ?) au libéralisme.
Le clivage entre république tchèque et république slovaque ne va-t-il pas dans ce sens ?
Le cas serbe risque aussi d’être significatif d’autres évolutions possibles dans l’ancienne URSS, par exemple — avec l’alliance spécifique d’un courant néo-stalinien et de courants nationalistes chauvins de tradition anticommuniste. Là, le nationalisme peut prendre une dimension antilibérale et agressive, génératrice de guerres locales ou régionales.
Ce danger n’est pas écarté par les négo ciations en cours dans l’ancienne Yougoslavie. Toutes les républiques, sauf la Slovénie, se trouvent déstabilisées par l’éclatement de la fédération en Etatsnations impossibles. Il est dès lors normal que, pour l’instant, les questions socio-politiques aient été balayées par la logique de guerre ou la redéfinition des relations entre communautés. Sauf en Slovénie.
Les syndicats dans l’éclatement et la guerre
Formellement, la Confédération des syndicats autonomes de Yougoslavie (continuation des anciens syndicats officiels) existe toujours. Dragan Radulovic, membre du conseil de la Confédération, reçoit toujours dans les locaux de la Dom Sindikata (Maison des syndicats), qui se dresse place Karl Marx et Engels — à Belgrade, pas question pour l’instant de débaptiser.
« Les syndicats jouent désormais un rôle nouveau » me dit Dragan Radulovic. « Auparavant, il s’agissait d’une organisation sui generis, socio-politique. Désormais, il s’agit de défendre les intérêts sociaux, dans un cadre pluraliste, y compris sur le plan syndical. » Le représentant des syndicats serbes, qui participe à l’entretien, met les points sur les “i” : « On peut dire que le syndicat était la courroie de transmission du Parti, même d’un point de vue constitutionnel. Les grèves n’étaient pas légalisées dans le système d’autogestion, car, disait-on, “les ouvriers ne peuvent faire grève contre eux mêmes”. Depuis 1988, les grèves sont légalisées. » Le pluralisme syndical existe effectivement, avec l’apparition, à côté des anciens syndicats, inégalement transformés selon les républiques, de syndicats indépendants.
Mais des liens confédéraux subsistent ils ? Le responsable de la Confédération élude une réponse directe à ma question : « La Confédération a pour rôle d’appuyer les positions communes des membres affiliés, de s’opposer au règlement violent des conflits et aux violations de la Constitution », me dit-il. « Fin février [1991], nous avons exigé la démission du gouvernement fédéral, d’un point de vue ouvrier, syndical ; en juillet, notre confédération a proposé une conférence de la paix à tous les syndicats (y compris les nouveaux syndicats non affiliés). En pratique, les syndicats slovènes et croates n’ont pas participé à la préparation de cette conférence. » Je dois en déduire que tout cela a échoué.
Les rapports interethniques
A mes questions sur la guerre1 et les positions syndicales à l’égard de la souveraineté des républiques, le représentant de la Confédération avance, avec une certaine mesure, le point de vue habituel des pouvoirs serbes : « Il s’agit d’une guerre entre les autorités de Croatie et la population serbe locale ; c’est là, la cause principale des conflits armés en Croatie. » Mais les syndicats croates se sont, quant à eux, solidarisés avec le gouvernement de leur république et ont décidé de suspendre le droit de grève tant que dure la guerre.
Qu’en est-il des syndicats serbes ? « La Serbie n’est pas en guerre », me répond Slavomir Milosavcievic, dirigeant de la centrale, « nous sommes d’ailleurs en train de mener une grève dans l’enseignement ». Lorsque j’évoque, à ce propos, un conflit en cours au Kosovo (province albanaise de la Serbie, dont l’autonomie a été remise en cause par le pouvoir de Slobodan Milosevic) où de nombreux écoliers sont, à ma connaissance, privés de cours après une purge massive affectant les enseignants albanais, la réponse est sans états d’âme : « Chacun a le droit à l’enseignement dans sa langue maternelle, mais il ne doit y avoir qu’un seul programme. » Le jacobinisme laïc centralisateur qui veut qu’en France les enfants d’immigrés apprennent « Nos ancêtres les Gaulois », sévit là dans un contexte culturel dramatiquement conflictuel, à l’encontre d’une population non slave qui représente quelques 90 % des habitants du Kosovo. Cela fait partie de la guerre qui couve.
En poussant un peu la discussion sur l’avenir, la logique grand-serbe monte à la surface : c’est l’identité des Macédoniens ou des Musulmans bosniaques qui est mise en doute par mes interlocuteurs. « Mais, vousmêmes, en France » ajoutent-ils, sûrs d’eux, « avez-vous accepté la notion de peuple corse ? ». Il n’y a pas de doute, la France jacobine est un modèle de référence fréquent chez les partisans d’une Yougoslavie comme Etat / nation d’un seul peuple, fût-il unifié par la force.
Les rapports inter-ethniques sont-ils meilleurs du côté des nouveaux syndicats ? Branislav Canak, journaliste de la radiotélévision de Belgrade, me présentera la branche principale du nouveau syndicat, Nezavisnost, indépendance, né à Belgrade le 25 mai 1991. On sait la guerre redoutable qui se mène à ce niveau, chaque gouvernement nationaliste présentant sa vision fanatisée du conflit, attisant la haine entre nations, exploitant les souvenirs et les hantises du passé. La télévision indépendante Yutel, émettant de Sarajevo, est interdite d’antenne aussi bien en Croatie qu’en Serbie. Les mises au pas des journalistes critiques ont sévi dans les deux républiques.
On comprend dès lors le lien direct entre ce syndicat indépendant et les mouvements antiguerre qui, notamment en Serbie s’efforcent de résister, avec difficulté, aux propagandes chauvines : « Nous ne voulions pas prendre part à cette guerre » me dit le journaliste. Il fait partie de ceux que le pouvoir serbe a écartés, jugeant leur information insuffisamment engagée… « Notre but était de donner courage aux autres peuples de Yougoslavie, de protéger la civilisation. Nous voulions faire un syndicat indépendant de tous les pouvoirs à l’échelle de la Yougoslavie, pas seulement de la Serbie. » Même au Kosovo ? « Moi, j’étais pour ; mais il faut reconnaître que c’était pas le cas de tous les journalistes ici. » Quant à la Croatie et à la Slovénie, « nous n’avons pas trouvé de journalistes partageant notre volonté ».
Slovénie : les questions sociales reviennent
Pourtant, en Slovénie, à la différence de la Croatie, la scène syndicale commence à être mouvementée, alors que les questions des choix socio-économiques reprennent le devant : la coalition de droite au pouvoir, DEMOS, doit passer de la phase d’opposition à l’ancien système aux difficultés des propositions alternatives. Sa faiblesse sur ce plan a été un moment reléguée à l’arrièreplan par les déclarations d’indépendance et l’intervention de l’armée. « La proclamation d’indépendance [le 25 juin 1991, ndlr] s’est faite dans un contexte de crise économique affectant la stabilité même des nouvelles équipes de la coalition libérale », me dit Rastko Mocnar. Dirigeant de la Ligue social-démocrate de Slovénie, une petite organisation extra-parlementaire, dont le projet est, en quelque sorte, l’alliance entre intelligentsia “soixante-huitarde”2, des managers “socialistes autogestionnaires” et des syndicalistes, il estime que les divergences ont été provisoirement étouffées par la « logique d’état de guerre » et la censure correspondante. « La chasse aux sorcières, dans les médias et dans l’économie, a tenu lieu de programme. Mais les problèmes reviennent sur le devant de la scène. » En effet, la Slovénie vit désormais dans un autre monde. Le danger de la guerre s’éloigne avec le retrait de l’armée fédérale. Les problèmes sociaux reprennent de l’importance.
« Les nouveaux syndicats indépendants sont des courroies de transmission de la politique gouvernementale libérale », estime mon interlocuteur, tout en portant, au contraire, un jugement positif sur les transformations en cours, affectant les anciens syndicats officiels rebaptisés “syndicats libres”. Près des deux tiers des travailleurs y sont affiliés. Mais, s’ils ont gardé ce potentiel, les actions menées ont, pour l’instant, été numériquement de faible portée. « On a oublié ce qu’était une lutte ouvrière bien que tout était “ouvrier” » me dit Milos Pvalica, un des dirigeants du Parti travailliste, qui vient de se former essentiellement sur la base des quelques 10 000 membres de ces syndicats anciennement officiels. « Les syndicats ne peuvent aller au Parlement et les travailleurs n’y sont pas représentés, c’est pourquoi nous nous sommes formés en parti », ajoute-t-il.
Radjko Lesjack, secrétaire général des syndicats libres de Slovénie est, lui aussi, membre du Parti travailliste. Mais, dans les locaux syndicaux, il tient à parler en tant que syndicaliste. Il explique les transformations récentes : « Nous avons dissout les anciens syndicats en congrès, il y a un an. Nous avons établi de nouvelles bases organisationnelles et programmatiques. Avant, tout travailleur faisait d’office partie du syndicat. Désormais, il y a acte volontaire d’adhésion. Nous avons obtenu 450 000 adhésions, ce qui représente 60 % de la population active. En outre, nous avons remplacé l’organisation territoriale antérieure par une structure par branche. Enfin, nous sommes indépendants de tout parti : seules des convergences constatées d’objectifs sociaux peuvent se traduire par des collaborations. »
En 1991, il y a eu 1 million d’heures de grève en Slovénie. Mais, dans l’immédiat, l’attention se porte sur les projets de loi qui vont se discuter au Parlement. L’offensive catholique sur l’avortement a, quant à elle, été mise en veilleuse pour faire bonne figure face à l’Europe libérale. L’essentiel dans l’immédiat concerne la propriété.
Quelle propriété ?
Le 10 septembre 1991, à la veille du débat au Parlement, les syndicats libres avaient convoqué une manifestation : « Nous demandons le report du vote après un vaste débat, alors qu’on veut faire passer des décisions essentielles au retour des vacances et après un été marqué par l’état de guerre », précise le président du syndicat. « Nous considérons que, sur des questions pareilles, il devrait y avoir référendum. » Le projet de loi, sur lequel la coalition de droite au pouvoir vient d’éclater, concerne la privatisation du secteur public largement prépondérant (la petite propriété existant depuis des décennies dans le secteur agricole et l’artisanat). La question de la restitution de la propriété agricole aux anciens propriétaires est également en discussion. En Slovénie, on n’en est même pas sur tous ces plans au niveau des changements juridiques de la Tchécoslovaquie3.
Les capitaux privés se font rares ici, comme ailleurs. On rencontre les mêmes difficultés de la privatisation que dans d’autres pays “socialistes” — absence ou faiblesse de capitaux nationaux ou internationaux, problèmes de base sociale et de légitimation de la privatisation, etc. Mais il faut ajouter l’instabilité politique des nouveaux pouvoirs liée à l’éclatement de la fédération et à la guerre : l’arrière-fond de conflits dans l’ancienne Yougoslavie est dissuasif pour les investisseurs potentiels, malgré les efforts des dirigeants slovènes pour obtenir un traitement à part auprès des banques. Et, en outre, les problèmes propres à l’autogestion renforcent l’instabilité sociale. En Slovénie, le discrédit du “socialisme” n’est peut-être pas aussi fort qu’ailleurs. La période proprement “stalinienne” a été de courte durée et les dirigeants slovènes ont été les plus réformateurs et libéraux dans la période récente, non sans succès économiques et politiques. En dépit de la faiblesse des réponses crédibles d’une gauche encore morcelée, la question du statut des travailleurs est ici plus qu’ailleurs une “culture”, sinon un programme précis : question de dignité et de justice sociale.
La manifestation convoquée par les syndicats, le 10 septembre 1991, n’a réuni que 5 000 personnes — mais, sur une population totale de moins de 2 millions de Slovènes, c’est loin d’être négligeable. Elle avait reçu le soutien de tous les groupes féministes (des syndicalistes aux femmes managers autogestionnaires ayant leurs organisations propres, en passant par les groupes de quartiers et les militants du mouvement antiguerre). La manifestation fut spectaculaire avec ses chaînes d’autobus parcourant la ville. Et elle a suffi pour que le vote au Parlement soit différé. Début 1992, on se trouve toujours en pleine querelle parlementaire. Les partis de droite sont divisés après la démission, en novembre 1991, de Joze Mencinger, économiste et Premier ministre, en désaccord avec les projets de loi.
Le passage en Slovénie de Jeffrey Sachs (qui, après avoir conseillé le gouvernement bolivien, a sévi comme on le sait en Pologne)4 a fait rebondir les clivages de stratégie : thérapie de choc ou pas, privatisation rapide ou pas et au profit de qui (anciens gestionnaires ou nouveaux entrepreneurs ?). Mais si les rapports de propriété sont obscurs en général dans les anciens pays du bloc socialiste (la bureaucratie n’étant pas propriétaire juridique et l’État lui-même ayant régné “au nom des travailleurs”), au pays de l’autogestion, la propriété est encore plus “à personne”, car elle est “à tous”.
Embûches constitutionnelles au pays de l’autogestion
La dernière Constitution, du temps de Tito, a explicitement exclu toute notion de propriété d’État, ou de propriété de groupe. Qui donc peut décider de la privatisation ? Et à qui peut-elle bénéficier ? Les propositions d’actionnariat ouvrier ont été faites là comme ailleurs pour faire “passer la pilule”. Mais, outre qu’elles ne sont guère attrayantes au moment où la crise économique est creusée par le choc de confrontation sans protection au marché mondial, elles constituent, en Yougoslavie, une régression du statut des droits de gestion qui existaient jusqu’alors gratuitement (quels qu’en aient été l’usage et le contexte). Pour les travailleurs, l’autogestion représentait une sorte de pouvoir en négatif, comme un droit de veto. Dans le système yougoslave, elle n’avait pas les moyens d’avoir une cohérence globale (macro-économique). Elle signifiait inégalement — selon les domaines — un droit de regard ou de participation aux décisions : davantage pour les questions de revenus et de consommation collective que pour les droits d’investissement. Elle se traduisait plus encore que dans les autres pays de l’Europe de l’Est et qu’en URSS par des relations spécifiques, de connivence conflictuelle avec les managers (les grèves éclatant là où cette connivence était rompue, ou encore là où les décisions d’autogestion n’étaient pas respectées). Il n’est donc pas étonnant qu’une partie des anciens managers — notamment là où les rapports de force sociaux ne permettraient pas de ruptures plus frontales — cherchent à s’appuyer sur cette tradition pour consolider leur pouvoir. Tel est un des enjeux actuels.
Comment privatiser ?
Une des caractéristiques essentielles de la ligne défendue par le Premier ministre démissionnaire est d’avoir voulu s’appuyer sur les anciennes équipes de gestion des entreprises, en leur donnant un poids prépondérant dans un processus “doux” de privatisation à leur profit — notamment dans les entreprises de taille petite et moyenne, mais aussi dans 300 grosses entreprises. A ce plan, s’est opposé celui de Jeffrey Sachs, proposant la formation d’institutions financières chargées de gérer des fonds communs de placement — des portefeuilles d’actions dont une partie importante serait distribuée gratuitement à la population, et un noyau dur contrôlé par l’État, en attendant de trouver des acheteurs crédibles, la logique étant la concentration du pouvoir effectif de ces institutions qui contrôleraient des équipes de direction appointées sur des bases capitalistes “claires”. Il s’agit d’un “modèle” proposé partout par Jeffrey Sachs, pour casser au plus vite les ambiguïtés de gestion liées à un quelconque maintien de droits autogestionnaires ou de relations de connivence managers/ travailleurs. Il implique transitoirement un véritable État propriétaire.
Ce projet de loi est passé dans deux des trois chambres du Parlement slovène, mais pas dans la troisième, celle du “travail associé” — autre héritage de la Constitution titiste5. Là, contrairement aux deux précédentes, où la coalition DEMOS détient encore la majorité, c’est le projet Mencinger qui domine, avec, aujourd’hui pour argument principal, le refus… de l’étatisation. Sur ce terrain, la droite est elle-même divisée, prisonnière en partie de ses propres arguments libéraux. Les managers anciennement communistes sont évidemment accusés de vouloir garder le pouvoir. Quant aux organisations de gauche, elles présentent un grand éventail de positions où l’on parle plus de “participation” ouvrière que d’autogestion ; elles sont également plus ou moins critiques sur les possibilités de s’insérer de façon positive — sans régression économique et sociale — dans le monde capitaliste et regardent vers différentes formes de communautés régionales — la question des liens économiques avec les républiques de l’ancienne Yougoslavie est tributaire de l’évolution du régime serbe et de la guerre. Mais elles sont dans une phase initiale, très instable, de définitions, scissions et regroupements subissant de plein fouet la difficulté d’articuler un projet à contre-courant.
Janvier 1992
* Des extraits de cet article ont été publiés dans Collectif, revue syndicale française.
- 1voir l’encadré en p. 11.
- 2« Autogestion de bas en haut ! A bas la bureaucratie rouge ! »
- 3Voir Inprecor n° 338 et 342 des 11 octobre et 6 décembre 1991.
- 4Voir Inprecor n° 339 du 25 octobre 1991.
- 5La première chambre représente les citoyens ; la deuxième, les “organisations socio-politiques” — partis, syndicats, organisations de masse, sur la base du système de délégations, toutes catégories sociales confondues, mais sur des bases d’entreprise.