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Chili : les Palestiniens et les mouvements sociaux mobilisés

par Pablo Abufom Silva

Le Chili compte l’une des plus grandes communautés palestiniennes de la diaspora en dehors du Moyen-Orient. Environ 700 000 personnes sont palestiniennes ou d’origine. L’histoire de cette communauté est marquée par l’assimilation, la reconnaissance, l’engagement politique et la différenciation entre les classes sociales. Le Chili est l’un des pays les plus inégalitaires au monde, et la communauté palestinienne locale est touchée de très près par cette réalité. Historiquement, il existe au Chili une bourgeoisie arabe/palestinienne liée au textile, à l’industrie manufacturière et à la finance. Il y a également une couche qui a trouvé sa place dans les institutions chiliennes, à la fois en tant qu’universitaires et en tant que médecin·es, avocat·es et politicien·nes de grande renommée. Comme d’habitude, l’histoire de la classe ouvrière n’est pas écrite de manière aussi visible que celle des communautés plus riches. Cependant, le fait qu’il existe une forte solidarité avec la cause palestinienne dans de larges secteurs de la classe ouvrière chilienne, y compris au sein d’une équipe de football qui compte de nombreux supporters non palestinien·nes, témoigne de l’histoire d’une communauté de migrants pauvres qui a trouvé sa place dans une société généreuse. Ils pourraient faire le lien entre leur propre histoire d’oppression raciste et coloniale et celle de nombreux·ses Palestinien·nes qui sont arrivés au Chili au début du 20e siècle en tant que travailleur·es migrant·es ou plus tard aux 20e et 21e siècles en tant que réfugié·es.

Au lendemain de l’offensive du 7 octobre menée par plusieurs groupes de la résistance palestinienne, les partis de gauche chiliens, les mouvements sociaux et les groupes palestiniens ont réagi à l’unisson : la Palestine a le droit de résister et de se défendre contre l’occupation, l’apartheid et le nettoyage ethnique. Mais la réponse des médias par un discours pro-israélien n’a pas tardé. La première réaction du gouvernement chilien a été une simple condamnation du Hamas et une réaffirmation du « droit d’Israël à se défendre ». Les secteurs les plus aisés de la communauté palestinienne au Chili ont réagi avec horreur, mais sans vision claire pour faire face à la crise actuelle. Cependant, la longue histoire de solidarité de la classe ouvrière avec le mouvement de libération palestinien a rapidement fait son apparition, et plusieurs mouvements sociaux et groupes anticapitalistes, comprenant des descendants de Palestinien·nes, ont joint leurs forces à la campagne BDS pour organiser une manifestation devant le palais présidentiel, la Moneda, le 11 octobre, au cœur de la contre-offensive sioniste dans la bande de Gaza et en Cisjordanie. Il s’agissait de la première étape vers la création de la Coordination pour la Palestine, une coalition de plus de 40 organisations chiliennes et chiliennes-palestiniennes.

L’étape suivante consistait à définir ses principes et ses principales revendications, puis à organiser une manifestation de masse contre la phase actuelle du génocide palestinien perpétré par Israël et soutenu par les États-Unis et l’Union européenne. Les principales revendications de la Coordination sont les suivantes : premièrement, la fin des attaques contre Gaza et le libre accès à l’aide humanitaire ; deuxièmement, la rupture par l’État chilien des liens diplomatiques, commerciaux et militaires avec l’État d’Israël ; et troisièmement, la promotion d’une initiative internationale des peuples et des gouvernements du monde entier visant à isoler les États-Unis et Israël et à faire pression sur eux pour qu’ils mettent fin à l’occupation et obtiennent le droit au retour pour les Palestiniens.

L’horreur croissante des attaques génocidaires d’Israël contre Gaza a convaincu de nombreuses personnes au Chili qu’il était temps de se mobiliser massivement afin de montrer leur opposition au massacre et de trouver une solution. Au cours de la dernière semaine d’octobre, la Coordination a appelé à un rassemblement de solidarité avec la Palestine le 4 novembre et a publié une déclaration contenant les demandes susmentionnées à l’intention des individus et des organisations. Des centaines d’organisations ont signé la déclaration et se sont jointes à l’appel au rassemblement du 4 novembre. Tous les secteurs chiliens et palestiniens se sont joints à l’appel de la Coordination et sont descendus dans la rue samedi 4 novembre lors d’une mobilisation massive qui a rempli l’avenue principale de la capitale, Santiago. Environ 20 000 personnes ont défilé dans la ville et ont appelé à la fin du génocide et à la rupture des liens entre le gouvernement chilien et Israël. Malgré un démarrage lent, il semble que le Chili puisse devenir un facteur important de la pression internationale en faveur d’un cessez-le-feu, à la fois en raison de la pression populaire et des décisions gouvernementales. L’horreur de l’occupation est, une fois de plus, confrontée à la solidarité internationale par en bas.

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