Le 30 mai dernier, à midi et demi, une bande d'une quinzaine d'hommes armés de fusils mitrailleurs et de matraques, et munis de talkies-walkies, faisaient irruption dans les locaux de Pacheco (Nord de Buenos Aires) du Parti Socialiste des Travailleurs, une organisation argentine, sympathisante de la IVe Internationale. Une vingtaine de militants se trouvaient dans les locaux. Ils furent tous frappés. Six membres du PST – trois hommes et trois femmes – furent kidnappés par la bande d'extrême-droite.
Les hommes – Antonio Moses, Oscar Dalmacio Mesa et Mario Sida – furent enfermés de force dans les coffres des voitures des assaillants. On retrouva leurs corps plusieurs heures plus tard. Ils avaient été torturés et assassinés. À côté des cadavres, on trouva une quarantaine de balles de différents calibres. Les femmes furent violemment frappées mais relâchées vivantes.
Moses, Mesa et Sida étaient tous des jeunes ouvriers et délégués d'usine de la région nord de Buenos Aires ; Moses et Mesa travaillaient dans des usines de la métallurgie, Sida dans une usine textile. Cette attaque n'est pas le premier cas de violence, dans cette zone, dirigée contre le PST. Le 7 mai dernier, Inocencio Fernandez, un militant du PST âgé de 26 ans, militant du syndicat de la métallurgie, avait été abattu. Fernandez avait organisé une liste d'opposition à la bureaucratie syndicale dans sa section lors des élections de mars du syndicat de la métallurgie.
Le quotidien de Buenos Aires CLARIN rapportait le 31 mai que deux attaques supplémentaires contre le PST avaient eu lieu le 30 mai à Mar del Plata : Carlos Petrani, membre du parti et militant syndical (dans le syndicat des employés de commerce) fut attaqué par une bande armée en sortant du local de son syndicat ; et une bombe explosa dans le local du PST, ce qui représente la dixième attaque violente contre le PST au cours de ces derniers mois. Personne ne fut blessé par cette bombe mais le local fut complètement détruit.
Ces attaques contre le PST font clairement partie d'une offensive générale de la bureaucratie syndicale et du gouvernement péroniste lui-même contre le mouvement ouvrier argentin. Les tentatives de Péron pour «institutionnaliser» son régime ont été confrontées à une riposte très large de la part du mouvement ouvrier, et les dirigeants du mouvement péroniste ont répondu à cette opposition par des attaques armées contre toutes les forces se situant à gauche du régime. La gauche du mouvement péroniste lui-même n'a pas été épargnée. Les militants du PST assassinés avaient soigneusement été choisis parce qu'ils avaient mené une lutte décidée contre la bureaucratie péroniste dans leurs syndicats.
Le PST annonce que des arrêts de travail ont eu lieu, en réponse à ces assassinats, dans les entreprises de ces ouvriers et dans une série de lycées. Des meetings étudiants de masse se déroulèrent quelques heures après la découverte des corps. Augustin Tosco (un des dirigeants du Cordobazo de 1969) prit la parole devant 2000 étudiants dans l'Université de Droit de Buenos Aires en solidarité avec le PST le soir du 30 mai. Toutes les organisations de gauche envoyèrent des messages de solidarité au PST. La Juventud Radical Revolucionaria (Jeunesse Radicale Révolutionnaire) appela à des mobilisations contre la violence d'extrême-droite. Le Comité Parlementaire de la Chambre des Députés d'Argentine (Comité qui regroupe tous les dirigeants des partis participant au Parlement) a demandé au gouvernement de prendre des mesures pour arrêter les assassins.
Il est clair cependant que le gouvernement péroniste qui est, en dernière analyse, sinon directement, responsable des attaques contre le mouvement ouvrier ne sera pas la force qui mettra fin à l'escalade de la terreur d'extrême-droite. C'est la tâche du mouvement ouvrier argentin, pour qui le problème de l'organisation de l'auto-défense armée se pose de façon de plus en plus aiguë, et du mouvement ouvrier international.
Le PST a demandé que des messages de solidarité internationale soient envoyés à Buenos Aires : Partido Socialista de los Trabajadores, 24 de Noviembre 225, Capital Federal, Buenos Aires, Argentina.
Le mouvement ouvrier international doit développer la solidarité la plus large possible avec les victimes des attaques de la bureaucratie péroniste et avec l'ensemble du mouvement ouvrier argentin.
Publié le 20 juin 1974