Pas de chèque en blanc, notre oui est un mécanisme d'horlogerie

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Gigi Malabarba, militant de longue date de la IVe Internationale, syndicaliste à Alfa Romeo, est un des animateurs du courant Sinistra critica du Parti de la refondation communiste (PRC). Il a été le chef du groupe du PRC au Sénat lors de la précédente législature et a été réélu en 2006 en annonçant d'emblée qu'il allait se retirer pour céder le siège à Mme Haidi Giuliani, dont le fils Carlo a été assassiné par la police lors de la manifestation altermondialiste contre le G8 de Gènes en juillet 2001. Il a présenté sa démission du Sénat le 19 juillet 2006, mais a encore mené jusqu'au bout la bataille engagée sur le financement de la mission militaire en Afghanistan. Nous reproduisons ici une interview de lui, réalisée par le journaliste parlementaire Luca Telese, parue dans le quotidien Il Giornale le 26 juillet 2006.

Le gouvernement chante la victoire. Eux aussi. Pour comprendre si la confiance votée sur la mission en Afghanistan a été un succès du noyau dur des " huit rebelles » de la gauche antagoniste ou bien une défaite il faut écouter le plus aguerri, Gigi Malabarba, sénateur de Rifondazione, qui dit : " Pas d'escompte. Notre confiance est… un mécanisme d'horlogerie. »

Luca Telese : Sénateur, partons des faits. Vous devrez voter le confiance alors que le texte de loi n'a pas été changé comme vous le vouliez. Alors Prodi et D'Alema ont-ils vaincu ?

Gigi Malabarba : Nullement. Nous avons mené une bataille et en deux mois nous sommes passés, selon les termes du gouvernement lui-même, des épithètes les plus féroces, de la définition d'irresponsables, perturbateurs, subversifs qu'il faut chasser, aux respectueuses déclarations d'hier ».

Luca Telese : Paroles de miel, certes. Mais vous ne paraissez pas être de ceux qui se contentent de miel.

Gigi Malabarba : En effet. En premier lieu il y eut un fait politique : aujourd'hui le ministre Chiti dit que notre désaccord est légitime, que nos positions méritent d'être représentées, qu'elles correspondent à des véritables humeurs du pays.

Luca Telese : Il vous courtisent pour l'heure car cela sert le vote, mais pensez-vous qu'ils vont continuer ?

Gigi Malabarba : Ils sont passés des menaces aux flatteries, c'est un premier fait positif indéniable »

Luca Telese : Voyons le second.

Gigi Malabarba : Notre opposition a déjoué le risque d'un accord secret et sans principes.

Luca Telese : N'êtes-vous pas trop optimiste ?

Gigi Malabarba : Non, c'est une donnée factuelle : le gouvernement avait une possibilité de choix et il a préféré nous répondre plutôt qu'accepter le secours du centre-droite qui était disposé à un soutien… intéressé ».

Luca Telese : Pas de votes centristes, d'accord. Mais les navires partent quand même et Enduring Freedom continue.

Gigi Malabarba : Voilà, c'est vraiment l'essentiel. Chiti nous a assuré qu'il y a un changement de perspective dans la politique du gouvernement en ce qui concerne les missions militaires. Dans six mois, nous, les pacifistes, nous aurons le moyen de vérifier si la promesse aura été tenue.

10. Tommaso Padoa-Schioppa est depuis le 20 avril 2006 le ministre de l'économie du gouvernement Prodi. Il avait été précédemment membre du Conseil d'administration de la Banque Centrale Européenne (1998-2006). Il s'apprête à imposer un " redressement des comptes publics » à la mode ultra libérale. Il vient de déclarer : " le gouvernement et le parlement sont responsables des comptes publics » et " les concertations sont importantes mais doivent être complémentaires à l'action du gouvernement, parce qu'ensuite c'est à l'exécutif de décider » (La Repubblica du 3 septembre 2006).

Luca Telese : Excusez-moi, mais dans six mois vous voterez à plus forte raison car vous avez déjà voté cette fois-ci.

Gigi Malabarba : Et pourquoi ? Nous n'avons signé aucun chèque en blanc. Même face à ces électeurs qui, perturbés par une campagne visant à faire de nous des démons, nous demandaient si nous n'étions pas trop maximalistes et s'il n'était pas nécessaire de donner un peu de temps au gouvernement, si ce n'était pas excessif de provoquer une crise sur une question de politique étrangère… Voilà, par rapport à ces électeurs nous serons plus forts en décembre, car nous pourrons dire : nous avions demandé un changement et nous avions donné le temps pour que ce changement puisse se produire.

Luca Telese : Donc en décembre, si les choses restent en l'état vous seriez prêts à ne pas voter la confiance ? Je ne vous crois pas.

Gigi Malabarba : Ça fait mal. Au contraire, je vous dirai qu'il ne faudra pas attendre décembre : en ce qui me concerne, je ne suis pas disposé à accepter la menœuvre néolibérale de Padoa-Schioppa (10). Les mouvements s'opposent à la guerre et au néolibéralisme.

Luca Telese : Mais alors qu'en est-il de la confiance ?

Gigi Malabarba : Une question de temps, de mécanisme d'horlogerie, si les choses changent. Si elles ne changent pas, la prochaine fois ce sera non.

traducteur
J.M. ( de l'italien)