La guerre génocidaire que l’État colonial sioniste mène depuis maintenant près de deux ans a atteint des proportions incommensurables. Avec les flottilles et la grève en Italie, on entrevoit une action susceptible de modifier le rapport de forces. L’attaque contre la Global Sumud, véritable acte de piraterie d’État, souligne à quel point la solidarité internationale dérange et doit donc être d’autant plus intensifiée.
« L’air est lourd comme le plomb » disait Nazim Hikmet pour illustrer des conditions dépourvues d’espoir. Mais le poète communiste turc s’empressait d’ajouter « accourez ! Je vous invite à faire fondre le plomb »… Ayant largement profité du soutien financier, militaire et moral du monde occidental, Israël ne cesse de déchainer une violence quasi apocalyptique contre la population de Gaza. Comme le philosophe radical Günther Anders le soulignait à propos d’Auschwitz et d’Hiroshima, la totalité des efforts d’anéantissement – dont l’abominable famine programmée – mobilisés par l’État sioniste envers la bande de Gaza et son peuple devient « hors limite » par rapport à notre perception, c’est-à-dire dépasse les capacités de notre entendement… et de notre conscience.
Des symboles…
L’indignation qu’a provoquée le génocide prend au niveau international diverses formes depuis ces deux dernières années et suscite en retour une répression brutale. Inprecor et la presse liée à la Quatrième Internationale tentent de rendre compte de toutes ces actions de solidarité. La reconnaissance symbolique par divers États d’un hypothétique État palestinien, qui dans les conditions actuelles ressemblerait à des lambeaux d’État, sert essentiellement d’alibi pour masquer leur inaction face au génocide. Mais étant engendré par les mobilisations de solidarité, cela reflète également un changement des rapports de forces. Et aujourd’hui, c’est la flottille Global Sumud, et son objectif de briser le blocus de Gaza, qui concentre l’attention de l’opinion publique pro-palestinienne au niveau mondial. Divers membres et sympathisant·es de la IVe Internationale ont pris part à la flottille, qui avant même son départ est devenue la cible d’attaques d’Israël.
… à l’action de masse
Toutefois parmi ces diverses formes de solidarité avec la résistance du peuple palestinien, celle à même de faire « fondre le plomb » est l’exceptionnelle grève générale en Italie. Exceptionnelle tant par son ampleur que par la dynamique qu’elle a libérée. Pour la première fois depuis des années – et depuis que les néofascistes ont accédé au pouvoir –, des dizaines de milliers de travailleuses et travailleurs, rejoints massivement par des étudiants, ont bloqué ports, routes et zones industrielles de Naples à Milan, de Gênes à Palerme. Si l’on ne peut pas parler d’une paralysie totale du pays, il est bien question d’une perturbation ciblée de secteurs stratégiques tel que la logistique et le transport.
Ce caractère intergénérationnel, interprofessionnel, coordonné et
étendu à des dizaines de villes constitue déjà en soi, sous une forme certes embryonnaire, une rupture avec l’ordre établi et porte en lui le potentiel d’une reconstruction de la conscience de classe dont l’un des éléments décisifs est l’internationalisme. Car la lutte de classe et ses principaux outils que sont la grève et le blocage sont mis au service de la solidarité avec le peuple palestinien. Cet élan ouvre ainsi la perspective d’un mouvement capable de lier la cause palestinienne aux luttes sociales contre la précarité, le militarisme et le néofascisme, posant les jalons d’une recomposition politique par en bas des travailleur·ses et des opprimé·es.
Le cas de la grève italienne n’est cependant pas isolé, si l’on prend en compte les mobilisations de masse et révoltes populaires qui ont traversé les divers continents ces dernières semaines, de l’Indonésie au Brésil, de la France au Népal et Madagascar dont nous essayons de comprendre les implications, les défis et les difficultés. Et surtout d'y inscrire la nécessaire solidarité internationale entre les peuples qui luttent et qui souffrent, comme en Ukraine ou au Soudan. Car nous, marxistes-révolutionnaires, sommes toujours persuadé·es que l’auto-activité des masses demeure notre point d’appui essentiel et notre principale source d’apprentissage dans la perspective internationaliste d’un monde émancipé de toute forme d’oppression.
Le 30 septembre 2025
Uraz Aydin est membre du comité central du Parti ouvrier de Turquie (TIP) et membre de la direction de la IVe internationale.