Depuis quelques semaines, le monde est soumis à des bouleversements impressionnants. Pour l’instant, nous sommes ballotés, mais l’intervention consciente des exploité·es et des opprimé·es est peut-être devant nous.
Le 5 novembre, aux États-Unis, les Démocrates subissaient, face à Trump, une défaite cuisante, produit de leur incapacité à n’être, ne serait-ce qu’un tout petit peu, les porte-voix des classes populaires. Le 3 décembre, le président sud-coréen Yoon, affaibli par le résultat très défavorable des élections d’avril, tentait un coup d’État, mis en échec par la mobilisation d’un million de personnes et des tentatives de grève générale. Le 8 décembre, le pouvoir soi-disant éternel de Bachar el-Assad s’écroulait sous les coups d’une rebellion de dix jours. Le 13 décembre, le gouvernement français de Michel Barnier est tombé après avoir été censuré par l’Assemblée nationale suite à l’utilisation de l’article 49.3 de la Constitution par le Premier ministre pour tenter de faire passer en force un budget qui n’obtenait pas de majorité parlementaire. Le 16 décembre, le chancelier allemand Olaf Scholz a perdu le vote de confiance des député·es avec le score sans appel de 394 contre la confiance, 207 pour et 116 abstentions, ce qui conduira à des élections législatives anticipées en février prochain.
Le chaos capitaliste
Le tableau serait incomplet si on en excluait, d’une part, les milliers de morts dues aux inondations en Espagne fin octobre et les morts et destructions dues au cyclone Chido à Mayotte et, d’autre part, les centaines de milliers de morts dues à la guerre menée par la Russie en Ukraine, et au génocide toujours en cours en Palestine dans un conflit qui a été étendu au Liban pendant plusieurs semaines. Et enfin le cortège de licenciements et de fermetures d’usines, en particulier dans l’automobile européenne, produits de la crise de surproduction et du déclin de l’Europe dans la concurrence inter-impérialiste mondiale.
Une impression de chaos se dégage, et il est parfois difficile de tirer des bilans positifs de nos combats, entre les défaites des mobilisations sur les retraites, les difficultés du mouvement de solidarité avec la Palestine, le fait que les échecs des autocrates en Corée et en Syrie ne produisent pas d’alternative socialiste, ou encore que l’extrême droite soit à l’offensive dans les pays occidentaux.
Faire renaître l’espoir
Mais à y regarder de plus près, des éléments positifs se dégagent : la chute du régime syrien est le résultat de l’incapacité de la Russie à mener de front la guerre en Ukraine et le soutien à Assad. Les déboires de Barnier et de Yoon sont bien le résultat des difficultés des capitalistes à maintenir leur domination dans le cadre de la crise du système. Mais gare : dès lors que le mouvement ouvrier n’est pas au rendez-vous, les forces réactionnaires avancent.
Il y a fort à parier que la crise en cours s’approfondira dans les prochains mois, dans toutes ses dimensions : crise écologique, guerres, crise économique et sociale, crises politiques… La gauche sera testée : sera-t-elle capable d’organiser la colère des classes populaires et de construire des contre-offensives, ou se contentera-t-elle de critiquer les forces politiques bourgeoises et de déposer des motions ? Elle sombrera alors face aux forces opposées, celles de l’extrême droite. Trotsky pronostiquait à partir d’élections en France en 1934 : « Les déplacements qui se sont marqués n’ont pas pour nous d’importance en eux-mêmes, mais comme symptômes des changements qui se produisent dans la conscience des masses. Ils montrent que le centre petit-bourgeois a déjà commencé à fondre au profit des deux extrêmes. Cela signifie que ce qui subsiste du régime parlementaire va être de plus en plus rongé : les extrêmes vont grandir et les heurts entre eux approchent. Il n’est pas difficile de comprendre que c’est là un processus inévitable ». Il ne fait guère de doute que, dans une grande partie du monde, les dynamiques sont similaires et que l’actualité du slogan « écosocialisme ou barbarie » est chaque mois plus prégnante.
Les prochaines années testeront aussi les révolutionnaires dans leur capacité à se rendre utiles dans la construction des révoltes de masse, la bataille pour leur unité et pour poser la question du pouvoir.
Le 16 décembre 2024