La séquence électorale complète comporte en France une échéance principale (l'élection présidentielle) et une échéance de plus en plus subordonnée (les élections législatives qui donnent la composition de l'Assemblée nationale). Maintenant achevée, on peut en tirer un bilan global, toujours provisoire.
Synthèse et articles Inprecor
La bonne nouvelle, contrairement aux craintes, est que ces élections ont été davantage polarisées sur les questions sociales que sur les questions migratoires et sécuritaires. Vrai moment de politisation, d'éducation populaire mais aussi de polémiques entre mouvements et partisans de gauche.
S'opposer dès maintenant à Macron dans la rue
La réalité politique française fait que, en pratique, le ton des rapports de forces est donné par les résultats de la présidentielle, en particulier de son premier tour.
Emmanuel Macron est devenu président sans surprise, étant donné la campagne médiatique acharnée pour le soutenir et étant donné l'adversaire, le Front national. Mais sans recueillir un vote massif de conviction. Il a été élu grâce à un fort vote contre Le Pen auquel s'ajoutent un nombre historique de votes blancs et nuls et une très forte abstention.
À gauche et dans le mouvement social et syndical, le débat sur la consigne de vote a été vif, reflétant le dilemme et le piège du système présidentiel français qui a vu s'affronter le tenant d'un libéralisme décomplexé et la candidate d'un parti fasciste.
Le Front national a assis son influence nationale en recevant le ralliement de gaullistes historiques de la droite traditionaliste qui ont franchi la ligne rouge. Il a acquis une implantation territoriale solide notamment dans la France du nord, de l'est et du sud-est. Quinze ans sont passés et Marine Le Pen a doublé le score de son père autour d'un programme qui défend " la préférence nationale » et qui désigne les étrangers comme responsables de la crise, mais son programme a porté tout au long de la campagne sur des questions sociales avec un profil antisystème. Marine Le Pen n'est pas élue, mais la progression de son mouvement est constante et touche des profils d'électeurs très diversifiés.
Cela dit la défaite de Marine Le Pen a généré une déception chez ses partisans puisque son score n'a pas dépassé la barre des 40 % qui représentaient officieusement le seuil d'un succès. En interne, les critiques fusent et les tensions n'ont pas manqué d'apparaître pour dénoncer les erreurs, notamment celles de Florian Philippot, un des fidèles de la présidente du parti, qui évoque à présent son départ si le Front national change de ligne sur la question de la sortie de l'euro. Le fondateur Jean-Marie Le Pen a questionné la stratégie du FN en attribuant cette défaite à l'influence qu'il considère trop grande de Florian Philippot. Les couteaux seront dégainés au sein du parti. Et de la famille Le Pen. Les divisions dans le parti se fédèrent en deux grands courants, deux figures et deux régions. La tendance incarnée par Marine Le Pen et Florian Philippot est ancrée dans le nord et l'est de la France. Le propos y est nettement social, étatique, antilibéral et souverainiste. Il s'adresse à l'électorat ouvrier du FN.
L'autre courant est représenté par la nièce, Marion Maréchal-Le Pen, ex-députée du Vaucluse. Elle a annoncé son retrait momentané de la vie politique pour raisons personnelles, mais très peu disent qu'il n'y a pas un conflit politique grave dans sa décision. Son propos met en exergue l'identité nationale et culturelle, le catholicisme conservateur et intégriste ; ce courant défend une conception libérale de l'économie, l'État devant se concentrer sur son autorité régalienne (armée, police, frontières). Son électorat est moins ouvrier qu'au nord et plus représenté dans le monde du commerce, des artisans, des petits patrons et des nostalgiques de l'Algérie française, nombreux dans cette région.
Emmanuel Macron est le produit de l'effondrement du vote en faveur des partis de droite et de gauche traditionnels qui ont gouverné la France depuis 45 ans de manière alternée ou en cohabitant.
Les résultats du premier tour illustrent bien la crise politique et démocratique que connaît la France et qui a débouché sur une étape nouvelle de la crise de la Vᵉ République avec la défaite électorale des deux partis, Les Républicains et le Parti socialiste, qui ont organisé jusqu'alors la bipolarisation de la vie politique, et la qualification de deux présidentiables… C'est une véritable explosion du paysage qui est en cours.
Les résultats des primaires de la droite et du PS ont été confirmés : les partis et les personnels qui ont dominé la vie politique depuis des décennies ont été éliminés. Les traditionnels affrontements entre la droite et la gauche de gouvernement ont été remis en cause, les mêmes politiques suivies de part et d'autre ont épuisé les clivages entre Les Républicains et les Socialistes.
Les personnalités de ces partis ont été " dégagées » lors des primaires de la droite puis de la gauche. Ce fut le cas de Nicolas Sarkozy, président de la République de 2007 à 2012, du parti Les Républicains, mais aussi de Manuel Valls, Premier ministre de François Hollande de 2014 à 2016, du Parti socialiste. François Hollande ne s'est même pas représenté, contrairement à tous ses prédécesseurs qui ont disputé un deuxième mandat, tant sa popularité était au plus bas.
Emmanuel Macron est ainsi devenu le réceptacle de tous les défenseurs du libéralisme de ces dernières décennies. Son mouvement " En marche » est une sorte de mouvement de " recyclage » qui va accélérer la décomposition du Parti socialiste voire du parti Les Républicains.
Est-ce la crise finale du Parti socialiste issu du congrès d'Épinay en 1971 ?
Le Parti socialiste est entré dans une crise profonde. La candidature de Benoît Hamon, qui avait défait Manuel Valls et symbolisé la sanction de la politique du quinquennat de Hollande, a été marginalisée avec 6,4 % des voix. Une partie du PS s'est évertuée à saper sa campagne en faisant le choix de Macron. En choisissant de ne pas s'appuyer sur la dynamique de la primaire, mais de préserver les équilibres au sein du PS, Benoît Hamon s'est trouvé soumis à la double concurrence sur sa gauche et sur sa droite des candidatures de Jean-Luc Mélenchon et de Macron. Désormais (mais tardivement) il a quitté le PS, lançant un nouveau mouvement qui se veut intermédiaire entre En Marche et La France insoumise. Ceci faisant suite au départ de Valls, la crise s'approfondit au PS, sans qu'il soit certain qu'à court terme une nouvelle social-démocratie puisse émerger de façon crédible.
Emmanuel Macron, ancien banquier chez Rothschild, issu du monde de la finance, est une construction soutenue par tous les grands groupes de médias et dirigeants des grandes entreprises comme l'ancienne présidente du Medef (syndicat du patronat), Laurence Parisot. Bénéficiant de puissants soutiens financiers et de ralliements politiques inédits en ce qu'ils proviennent de divers bords, il a réussi à imposer de force au courant social-libéral du Parti socialiste d'assumer ouvertement un programme ultralibéral et à exploser le clivage gauche/droite. Par sa trajectoire (ancien ministre de Hollande) et par les électeurs et électrices qu'il entraîne, il est issu de la gauche gouvernementale. Mais par la cohérence idéologique qu'il développe - libéralisme assumé, alliance avec François Bayrou, dirigeant du Modem (centre droit), et des secteurs de la droite, rupture de tout lien avec le mouvement social - il réalise un basculement de secteurs de la gauche vers ce qui constitue une nouvelle droite. Le phénomène Macron traduit l'aboutissement d'une dégradation du rapport de forces, qui cristallise des évolutions en germe depuis plusieurs années (construction de l'Europe libérale, adaptation à la logique de marché, individualisme, alliance gauche-droite…).
Synthèse et articles Inprecor
Il a donné l'illusion d'une rupture (jeune, ni droite-ni gauche, sans parti), mais il représente bien une continuité. Il a fait partie du gouvernement de Hollande, il a soutenu la loi travail, engagée par l'ancien gouvernement PS, qui supprimait nombre de protections légales dans les rapports patrons/salariés et avait provoqué une longue confrontation sociale. Il veut même la renforcer, avec un programme offensif de casse des droits sociaux en gouvernant par ordonnance (ce qui permet d'éliminer presque tout contrôle par le Parlement). Le calendrier des contre-réformes est déjà annoncé : à l'automne une nouvelle loi travail pour détruire le code du travail puis, début 2018, une modification historique du système des retraites, en passant à un " compte notionnel », sans exclure un nouvel allongement de l'âge officiel de départ à la retraite.
Macron est un virulent défenseur du libre-échange, comme l'Accord économique et commercial global (AECG ou CETA) entre l'Union européenne et le Canada… C'est un européen libéral antisocial et son ami Junker, président de la Commission européenne, vient de lui rappeler que " les Français dépensent trop ». Macron planifie déjà des coupes budgétaires dans les dépenses publiques et va s'appuyer sur " le bilan » de l'ancien gouvernement pour s'émanciper de certaines de ses promesses, et accentuer, une fois de plus, des choix austéritaires.
L'enjeu est donc de s'opposer à lui dès maintenant, dans la rue, par un Front uni de toutes celles et tous ceux qui proclament vouloir lui résister.
La France insoumise : une formidable dynamique de campagne !
Pour la troisième fois depuis l'instauration du suffrage universel pour l'élection du président de la République en France, la " gauche » est absente du second tour. Mais la dynamique de la campagne de Jean-Luc Mélenchon est sans nul doute un évènement majeur pour la reconstruction d'une vraie gauche. Il a réussi son pari avec près de 20 % de suffrages exprimés, ce qui représente un peu plus de 7 millions de voix. En arrivant quatrième au premier tour, il réalise une percée remarquable. Ce succès s'enracine dans la force du rejet de la politique de Hollande et de Valls, dans les mobilisations sociales, contre la loi travail, le mouvement Nuit debout, les mouvements écologistes, démocratiques qui se sont développés ces dernières années. La candidature de Jean-Luc Mélenchon a polarisé la majorité des électeurs et électrices de gauche (comme en a témoigné l'affaiblissement en parallèle des intentions de vote pour Benoît Hamon du Parti socialiste) et de nombreux abstentionnistes. Elle a notamment obtenu un succès important dans les quartiers populaires, chez les travailleuses et travailleurs ainsi que dans la jeunesse.
Pour la première fois, une candidature à gauche s'opposant à la politique gouvernementale du PS et à l'hégémonie de celui-ci a été envisagée comme une perspective crédible permettant d'accéder au pouvoir et non comme un moyen de pression à gauche sur le PS. La campagne de Jean-Luc Mélenchon l'a imposé comme le principal candidat de gauche opposé au libéralisme. Cela a été possible à travers le programme porté, qui s'il n'est pas anticapitaliste à proprement parler est assez radical : refus de l'austérité, démocratie et VIᵉ République, transition écologique, Sécurité sociale intégrale, égalité des droits… dans le cadre d'une campagne en résonance avec les luttes sociales de ces dernières années.
Le point majeur, décisif, après tant d'années de déceptions, après les mobilisations contre la loi travail, a d'abord été la rupture hargneuse et définitive avec le Parti socialiste, projetant que tout ce qui touchait au PS allait être balayé dans cette confrontation très centralisée qu'était l'élection présidentielle. Cela a entraîné la rupture politique avec le Front de gauche, l'alliance née en 2009 entre le Parti de gauche de Jean-Luc Mélenchon et le Parti communiste français, et avec les hésitations du Parti communiste quant au Parti socialiste.
Le choix a été de construire un mouvement par en bas et en dehors des partis : La France insoumise, avec un fonctionnement horizontaliste et très verticaliste à la fois. Les décisions principales étaient entre les mains d'un petit groupe autour du candidat. Mais cela s'est combiné avec l'incontestable vitalité " libre » en bas, et en masse, et l'appui (obtenu par des engagements sur internet) de près de 500 000 personnes. Les partis (ou fractions de partis) qui se sont engagés dans La France insoumise disposaient d'un " espace politique » spécifique où ils pouvaient faire valoir leurs propositions, sans qu'il soit possible à ce stade d'en tirer un bilan concret. Mais il est vrai que la promesse de rupture avec les " partis traditionnels » a convaincu nombre de personnes de soutenir le processus. Sur ces deux questions du fonctionnement démocratique et de la place de courants d'idées divers, héritiers d'histoires politiques spécifiques, le débat va s'ouvrir au lendemain des législatives, alors qu'il est question de pérenniser le mouvement. Alors devra aussi être discutée l'épineuse question de la relation aux mouvements sociaux. On ne peut pas dire que FI en soit coupée, puisque le programme général comme les cahiers spécifiques à chaque secteur sont, au final, souvent des copiés-collés de ce qu'a produit chacun des mouvements sociaux. Mais ceux-là ne sont pas pris en compte en tant que tels et, réciproquement, jusqu'à maintenant, la mobilisation des membres de la FI reste purement électorale (peu de FI en tant que tels dans le soutien aux migrants, indépendamment des questions " de ligne », ou dans les mobilisations féministes). Est-ce parce que c'est justement les élections ou un problème plus durable à résoudre ?
Mélenchon a aussi compris l'utilisation hautement productive des nouveaux moyens de propagande, avec une véritable rupture générationnelle parmi les animateurs de la campagne. Il a su faire connaître et défendre un programme keynésien radical, écologiste, démocratique sur le plan institutionnel. La manifestation réussie à Paris, pour une VIe République, a montré la dynamique de la campagne en phase avec la crise du régime politique et de son système de représentativité. Mélenchon a en outre particulièrement développé le thème de la transition écologique, avec la sortie du nucléaire et des énergies fossiles, axe fort dans le développement d'arguments pour construire des alternatives à cette société.
Des points ont soulevé des désaccords et des polémiques à gauche : sur la question syrienne, géostratégique, et sur celle de la liberté d'installation des immigrés. La suppression du chant de l'Internationale, pour ne garder que la Marseillaise à la fin des meetings, et l'abondante présence des drapeaux bleu-blanc-rouge à chaque initiative a questionné. Ce patriotisme affiché allait-il éloigner les populations des quartiers populaires ? Certains sont allés jusqu'à juger que c'était un moyen de polariser les électeurs du Front national…
Au final, Mélenchon a été fortement entendu dans les quartiers populaires. Parce que les liens avec le PS y étaient coupés.
Il y a envoyé des signaux perçus comme profondément amicaux sinon il n'aurait pas eu 37 % du vote musulman. Ce que nous voyons comme signes problématiques " patriotes » voire impériaux n'ont pas été perçus comme tels. Quand il dit à Le Pen " arrêtez avec la religion » c'est compris comme " qu'on nous laisse vivre en paix ». Cela a permis une mobilisation accrue des couches populaires pour Mélenchon et lui a assuré la pole position face à Benoît Hamon. C'est marquant à Marseille, où Jean-Luc Mélenchon (24,82 %) est passé devant le FN (23,66 %).
Des débats ont été vifs pour défendre l'unité entre Jean-Luc Mélenchon et Benoît Hamon avant le premier tour. Ce rapprochement a d'abord été associé à l'espoir d'une candidature unique des deux candidats partageant une optique réformiste de gauche et susceptible de peser. Les multiples pétitions dans ce sens ont, sous des formes diverses, exprimé cet espoir. Mais les projets stratégiques respectifs de ces deux candidats, bien que proches à maints égards, étaient rigoureusement contradictoires avec tout renoncement de l'un pour l'autre. Après les primaires socialistes, Hamon a cru pouvoir maintenir à tout prix l'unité d'un PS moribond. Le rejoindre n'avait aucun sens pour Jean-Luc Mélenchon. Réciproquement rejoindre La France insoumise signifiait pour Hamon mettre une croix sur sa stratégie de " primaire » et de recomposition du PS. Sauf que cette stratégie a été vouée à l'impasse comme le montre l'éclatement actuel du PS, Hamon quittant le parti et lançant un nouveau mouvement, alors que des figures historiques comme Martine Aubry et Anne Hidalgo (maire de Paris) en lancent un autre. Sans compter tous ceux qui ont rejoint Macron...
Jean-Luc Mélenchon a attiré un électorat jeune (29 % chez les 18-24 ans), chômeur (32 %), employé (24 %) et ouvrier (25 %). S'il a mordu de façon anecdotique sur l'électorat FN (4 %) et l'électorat de droite (3 %), il a surtout permis une remobilisation de l'électorat de gauche, qui s'était abstenu dans les élections intermédiaires.
Jean-Luc Mélenchon et la campagne de La France insoumise ont permis que les débats se portent sur autre chose que l'islam et l'immigration et ont réussi à faire reculer le FN dans certains quartiers. En diabolisant Mélenchon, dans la dernière semaine avant le premier tour, les médias ont sciemment fait le jeu du FN. Leur calcul cynique était probablement que cela faciliterait l'élection de Macron au second tour…
Les législatives confirment l'essentiel
Le système majoritaire à deux tours français a un puissant effet multiplicateur. Avec 33 % des voix au premier tour, le parti de Macron s'assure la majorité absolue, mais moins nette que ce qu'annonçaient les sondages. Surtout l'abstention a été massive, battant les records et de loin. Si bien que cette majorité représente en réalité une petite minorité des habitants. Elle sera dotée pourtant de pouvoirs exorbitants, et les offensives antipopulaires brutales vont se succéder. Impossible de dire si ce sera avec succès ou si la faiblesse de l'enracinement lui rendra les choses difficiles. La droite ancienne est nettement affaiblie et de plus profondément divisée quant à son attitude face à la nouvelle majorité. Et ce n'est rien à côté du PS, laminé et lui aussi pourtant divisé entre le soutien, l'opposition et l'abstention. La crise politique générale est donc largement confirmée. Le FN a subi un très lourd recul par rapport aux scores de la présidentielle. Processus habituel pour lui, mais cette fois-ci beaucoup plus marqué. Il se confirme que les dégâts internes seront lourds et délicats à solder. Comme l'extrême droite a subi de nombreux revers en Europe récemment, il y a peut-être là un phénomène nouveau de difficultés sérieuses.
Les forces qui ont soutenu Mélenchon se sont présentées divisées, effet combiné des trop grandes prétentions du PCF et d'une certaine fermeture de la FI. De plus, l'abstention a joué particulièrement contre cette dernière, essentiellement enracinée dans le vote jeune, celui des ouvriers et employés, celui des quartiers populaires, justement les couches les plus abstentionnistes. Mais le score général reste conséquent, plus de 11 % pour la FI et 2,7 % pour le PCF. Soit, en pourcentage, 5 points de moins qu'à la présidentielle, mais deux fois plus que le Front de gauche en 2012. Le PC en sort très affaibli politiquement même s'il a réussi à conserver un groupe parlementaire. Pour la première fois de son histoire, la gauche radicale, avec 17 élus, disposera d'un groupe parlementaire qui devrait être un point d'appui solide pour faire face aux durs combats à venir.
Incertitudes, confrontations probables, potentialités
Au final, et pour l'instant, Macron semble avoir réussi une double opération. Sa propre élection évidemment. Mais aussi l'affaiblissement sérieux du PS et maintenant la possibilité de fracturation de la droite. De nombreux secteurs du PS et de la droite qui ne l'ont pas encore rejoint sont disposés à le faire. Les mains libres apparemment pour lancer l'offensive libérale dont rêvent le patronat et la Commission européenne, et qui, plus ou moins, avait été freinée jusque-là. Mais ces succès politiques n'annulent pas l'image d'un pays profondément fracturé qu'a révélé le premier tour de la présidentielle. Et si l'incontestable fatigue sociale après tant de défaites peut favoriser la politique de Macron, il est tout autant possible qu'à la faveur de telle ou telle mesure, de tel ou tel événement, le pays retrouve le chemin d'une confrontation qui peut se révéler brutale. Ceci sous la menace de l'extrême droite, certes entrée dans des divisions sérieuses, mais qui a quand même réuni 34 % des voix au deuxième tour de l'élection. Heureusement un bloc à peu près équivalent s'est manifesté à gauche, au premier tour de la présidentielle (avec une très forte participation électorale), qui manquait jusque-là, qui donnera peut-être une assise pour que ces éventuelles confrontations tournent du bon côté. À condition que les promesses contenues dans ce vote de gauche puissent valablement fructifier dans l'existence d'une force à la fois nouvelle, démocratique, et en lien avec le mouvement social dans sa diversité. Pour l'instant, seule une convention de La France insoumise est prévue à l'automne. L'enjeu devrait être " un processus constituant ». Le débat est ouvert et il faut s'en saisir. ■
* Samy Johsua et Flavia Verri, membres de la section française de la IVe Internationale, sont militants d'Ensemble ! - mouvement pour une alternative de gauche écologiste et solidaire. Flavia Verri est membre du Comité international de la IVe Internationale. Samy Johsua est l'auteur, entre autres, de L'École entre crise et refondation (La Dispute, 1999), l'École pour tous (La Dispute, 2000) et d'Une autre école est possible (Textuel, 2003).