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" Un projet de sortie de crise fondé sur l'idée de progrès et de justice »

par
é Joanna

Projet politique d'un gouvernement de Syriza (septembre 2014)

* Alexis Tsipras, principal dirigeant de Syriza, a présenté le projet politique d'un gouvernement de Syriza, résumant les mesures d'urgence préconisées par son parti, lors de l'Exposition internationale de Thessalonique, le 13 septembre 2014. C'est devenu le projet éléctoral du futur gouvernement et donc un document historique, témoignant à la fois des engagements et des limites de ce à quoi s'engageait Syriza. Nous reproduisons ici ce discours en le mettant en forme et en y supprimant seulement les formules répétitives adressées au public. La traduction de sa totalité a été publiée en français sur le site de Syriza : http://syriza-fr.org/2014/10/03/discours-de-alexis-tsipras-a-lexpositio…

Si je suis parmi vous aujourd'hui, ce n'est pas pour accomplir une simple formalité, c'est pour mettre en lumière quelques vérités et exposer mes engagements vis-à-vis du peuple grec en présentant un projet de sortie de crise fondé sur l'idée de progrès et de justice.

Un projet qui définit les axes fondamentaux de la nouvelle orientation " post mémorandum » de notre pays. Un projet concret, dont les propositions chiffrées démontrent que les principes de la politique gouvernementale de Syriza, fondés sur la justice sociale, la solidarité, l'État de droit, la transparence, la méritocratie, la sécurité économique et le respect de la dignité de tout citoyen, ne sont pas dépourvus du sens des réalités économiques. (…)

Car le contexte international assigne et impose à l'État grec une conduite responsable en tant que force européenne, mais aussi un rôle de négociateur international fiable.

Synthèse et articles Inprecor

La Grèce ne peut pas être réduite au rôle de cinquième roue du carrosse. Elle ne peut pas être une spectatrice passive de l'évolution internationale.

Agir dans le périmètre de ses capacités n'exclut pas la force d'âme. Sans complexe d'infériorité, et surtout avec une politique extérieure active et multidimensionnelle, la Grèce pourra protéger ses intérêts.

En dépassant les rôles d'élève obéissant ou de porte-serviette des intérêts allemands, endossés docilement par M. Samaras et M. Venizelos qui se sont empressés de consentir à des sanctions économiques contre la Russie, sans aucune réserve, sans se préoccuper de leurs répercussions sur l'économie grecque, et entraînent le pays, malgré la situation dramatique de son économie, dans une guerre économique dangereuse qui ramène toute l'Europe à une guerre froide qu'on avait cru révolue.

Et ce n'est pas tout. M. Samaras et M. Venizelos font preuve non seulement d'inconscience quant au coût financier de leurs décisions, mais ils font aussi preuve à toute occasion d'un refus ferme et obstiné de soutenir les intérêts nationaux.

Leur impudence a atteint un point culminant il y a quelques jours, lorsqu'ils se sont abstenus de voter pour la protection de la souveraineté nationale des États surendettés, à l'Assemblée générale de l'ONU.

Pendant que la position de l'Allemagne de Mme Merkel se voyait bloquée par son isolement, la Grèce surendettée s'est rangée avec les protecteurs des spéculateurs, dévoilant ainsi l'immoralité politique et l'indignité du gouvernement Samaras, d'un gouvernement qui ne se considère pas responsable devant le peuple grec, mais uniquement devant les lobbies financiers des créanciers et des fonds spéculatifs.

Mais permettez-moi de revenir sur le sujet principal de mon discours aujourd'hui, qui concerne l'économie de notre pays et plus particulièrement la sortie de cette crise épouvantable que nous traversons depuis quelques années. Une crise qui n'est pas derrière nous, mais qui persiste et récidive tant en Grèce que dans le reste de l'Europe.

Mais si en Europe, de plus en plus de voix s'élèvent pour réclamer un changement de politique, nos gouvernants continuent de parler de " success story ». Pendant que les autres signalent le gouffre, M. Samaras nous y entraîne tête baissée.

Tout le monde se rend enfin compte que face à la crise les politiques d'austérité s'avèrent, non seulement inappropriées et inefficaces, mais aussi dangereuses.

Car nous avons été témoins en Europe de la succession de toutes les phases de mutation de la crise. Initiée par une crise financière, elle a évolué ensuite vers une crise sur les dettes des États qui a provoqué la propagation de la déflation que nous observons dernièrement.

L'establishment politique européen, face à la menace déflationniste engendrée par son obstination dogmatique dans l'austérité néolibérale, se trouve contraint aujourd'hui de réajuster sa politique. Ces réajustements, qui ne sont ni profonds ni suffisants, sont pour autant visibles. Mais M. Samaras suit à distance non seulement le processus décisionnel européen mais aussi les événements. Uniquement appliqué à suivre à distance respectueuse Mme Merkel, il se range finalement du côté des forces d'hier.

Syriza ne suit personne. Nous montons un front et luttons pour un changement aussi grand que nécessaire. À côté de nous se rangent toutes les forces de demain, stimulées par la mobilisation des peuples aguerris de l'Europe du Sud.

L'évidence saute aux yeux de l'Europe. Le néolibéralisme a échoué. Le réalisme impose le choix du progrès pour sortir de la crise. Celui de la solidarité et de la justice sociale et non pas celui de l'exténuation des sociétés par les programmes d'austérité.

Le danger de récession qui menace l'Europe et par ricochet l'économie mondiale fait de ce changement immédiat de la politique de notre pays par un gouvernement de Syriza une nécessité pour le salut social de notre pays et un exemple pour l'Europe.

Notre voix est entendue. Nous ne sommes plus seuls. Nous ne crions pas dans le désert. Nos propositions pour l'arrêt immédiat de l'austérité, pour l'application d'une politique de la demande, pour la mutualisation de la dette, pour un " paquet d'investissements » destiné à promouvoir la croissance dans les pays de la région sont écoutées et comprises.

Beaucoup de choses ont changé depuis les dernières élections nationales en 2012. Et non pas seulement en Grèce. Dois-je vous rappeler que, lorsqu'il y a deux ans nous proposions des solutions " européennes » à la crise, ils nous répondaient que nous manquions de réalisme puisque l'euro-zone ne disposait pas de mécanismes institutionnels communs pour la gestion de la crise. Mais cela a été fait depuis. Malheureusement l'adoption de ces mécanismes a été accompagnée de l'imposition à ses États membres de mémorandums de dévaluation interne. Un choix politique qui enfonce l'Europe dans la récession et recycle la crise. Pour y mettre fin, il faut un nouveau rapport de forces au sein de l'Europe.

Ils nous disaient aussi que la Banque centrale européenne (BCE) devait faire preuve de parcimonie dans l'achat des obligations d'État sur le marché secondaire, car cela équivalait à un financement indirect institutionnellement interdit. Toutefois, en 2012, M. Draghi a annoncé qu'il n'y aurait pas " de limite quantitative » aux interventions de la BCE. Actuellement, même notre revendication du rachat direct des obligations d'État n'est plus un tabou.

L'assouplissement des règles de la discipline budgétaire et l'étendue des projets européens d'investissement sont également de plus en plus évoqués comme des moyens d'éviter la déflation et une nouvelle récession.

Et pourtant ! Nos adversaires politiques, aveuglés par leur dogmatisme et leur ignorance, ironisaient sur notre hardiesse à avancer de pareilles propositions, en nous accusant tantôt d'irréalisme tantôt d'" anti-européanisme ».

Aujourd'hui, nos propositions, formulées dès le début de la crise, se trouvent au centre des débats de la BCE. Mais la pertinence d'un débat n'est pas seulement une question de contenu mais aussi de timing. Et les fissures entreprises actuellement par la BCE sur le mur de Berlin n'auront pas les effets espérés sur la crise car elles n'arrivent que très tardivement.

Si l'impasse de l'austérité est principalement visible en Grèce, on l'aperçoit également partout en Europe. Je ne vais pas démontrer encore une fois l'échec des mémorandums. Nous avons déjà fait une analyse détaillée de cette calamité, ici même, et à deux reprises par le passé.

Il faudra cependant souligner l'augmentation du taux d'inflation de 0,99 % en 2013 à 1,4 % en 2014. La déflation menace de replonger notre pays au fond de la récession avant même qu'il n'ait sorti la tête de l'eau.

Le Premier ministre, M. Samaras, a fourni il y a une semaine, en ce lieu même, une preuve supplémentaire de l'échec de la " dévaluation interne » en Grèce, en confirmant la continuation ou plutôt la pérennisation de la surimposition pour les petits et moyens revenus.

L'aberration des taux de la nouvelle taxe foncière (ENFIA) - prolongeant sous une autre appellation l'impôt instauré en 2011 et inclus directement dans les factures d'électricité -, le maintien de la taxe " exceptionnelle » de solidarité, ainsi que l'augmentation de la taxe de consommation sur les produits pétroliers, illustrent la perpétuation de l'acharnement du ministère des Finances sur les petits revenus.

Toutefois, M. Samaras a promis en même temps un miracle : la croissance dans un contexte défavorable, avec un marché intérieur ruiné et le volume des investissements en chute libre.

Regardons de plus près : la formation brute de capital fixe de 26,7 % du PIB en 2007 est passée à 13 % en 2013. Et sa baisse a continué au deuxième trimestre de 2014 en enregistrant une baisse annuelle de 0,8 % du PIB.

Ainsi, avec une récession de 0,7 % au premier semestre de 2014, pour atteindre l'objectif fixé pour cette année d'une augmentation de 0,6 % du PIB, il faudrait enregistrer les deux prochains trimestres un accroissement de 3,8 %. C'est infaisable.

Mais, même si un tel miracle était réalisé, il n'entraînerait pas une amélioration qualitative de la société ou de l'économie. Il ne mettrait pas fin à l'effondrement de la société et de l'économie.

La déstructuration économique et la dévastation sociale ne se corrigent pas par des variations infimes du PIB.

Chômage très élevé, bas salaires, emplois précaires, la Grèce est condamnée à vaciller entre récession et stagnation par la politique de M. Samaras et de M. Venizelos.

Par ailleurs, M. Samaras ne promet pas seulement une croissance sans investissements mais aussi une sortie de la crise sans diminution de la dette publique. La question d'une négociation sur le problème de la dette ne fait pas partie de ses objectifs. Car d'après lui, et comme il le déclare souvent en chœur avec les créanciers, la dette est viable. Il a même annoncé, il y a quelques jours, qu'il attendait que les créanciers lui livrent un certificat de viabilité de la dette !

Qu'est-ce qu'on ne doit pas entendre ! Mais pour finir, on déduit que, puisque M. Samaras prétend que la dette est viable avec la garantie des créanciers, toute négociation est superflue et sans objet. Ne nous faisons pas d'illusion. En se riant du peuple grec, M. Samaras se ridiculise lui-même. Une telle situation pourrait prêter à rire si la situation n'était pas aussi grave.

Il nous faut dire la vérité au peuple grec, si désagréable soit-elle.

Il faut que le peuple grec se rende à l'évidence. Il n'est plus possible que notre pays sorte de la récession, qu'il retrouve une croissance viable, quand tous les indicateurs sont au rouge :

• Dette publique : deux fois supérieure du PIB.

• Dette privée sous la forme de dettes à l'État, aux fonds de pensions et aux banques: quasiment équivalente au PIB.

• Et en plus, une obligation mémorandaire d'un excédent de 10 milliards d'euros destinés uniquement au paiement des intérêts.

Dans une telle conjoncture, la viabilité de la dette est aussi illusoire que la quadrature du cercle. Nos partenaires le savent naturellement aussi bien que nous. Et la restructuration de la dette publique de notre pays est inévitable.

En fait, la seule vraie question qui se pose est de savoir comment et dans quels termes elle sera concrétisée :

• Une négociation pour aboutir à une solution plausible et viable ou pour mieux hypothéquer notre pays en cédant totalement son économie aux mains des créanciers ?

• Une négociation dont les termes favoriseront la croissance ou l'imposition de nouvelles mesures d'austérité qui vont compromettre encore plus les potentialités productives de notre pays ?

Ce qui importe donc est de connaître les objectifs et le projet politique de la Grèce dans le cadre d'une négociation de la dette. La Grèce sera-t-elle seule face à ses créanciers ou entourée du soutien des alliés qu'elle aura sollicités ? Se tiendra-t-elle comme serre-file de la stratégie allemande ou sera-t-elle le fer de lance des changements nécessaires de l'Europe ?

Depuis le début de la crise, Syriza déclare fermement et avertit que la Grèce ne constitue pas un cas à part et que la crise de la dette n'est pas spécifiquement grecque mais européenne.

C'est pour cela que nous réclamons la réunion d'une " Conférence européenne pour la dette » pour la gestion du surendettement de l'euro-zone et nous avons comme objectif une solution à l'instar de celle adoptée pour l'Allemagne par la Conférence internationale de Londres.

La négociation sur la dette nécessite un projet politique concret et présuppose un débat qui laisse s'exprimer des avis divergents sur l'objet du litige. Des contestations sur la pertinence de la politique appliquée et ses résultats. Mais M. Samaras ne conteste jamais. Il est toujours d'accord sur tout. Bien obéissant, il obtempère toujours aux ordres de Mme Merkel. Il n'est donc pas apte à négocier.

Quand on le voit à tout bout de champ vanter les résultats de l'austérité, comment ne pas penser que la poursuite de cette politique d'austérité sera la condition préalable de tout accord avec les créanciers sur la dette publique.

Par conséquent, ce gouvernement n'a ni la volonté ni la capacité de négocier et de défendre les intérêts nationaux. Il est inapte à revendiquer une solution viable pour le peuple grec.

Seul un gouvernement investi par un mandat populaire récent pourra organiser une stratégie nationale approuvée et soutenue par le corps social.

Pour cela nous demandons des élections sans délai, pour que s'apaise le vent de la catastrophe.

Nous ne demandons pas des élections par impatience de gouverner. Nous demandons des élections immédiates parce que le pays ne peut plus attendre. Parce que le peuple ne peut plus patienter. Nous demandons des élections parce que l'intérêt du peuple l'exige. Nous demandons un mandat fort, soutenu par une large majorité parlementaire et un encore plus large consensus social, pour mener une négociation qui protège au mieux les intérêts de notre peuple en Europe. Nous demandons le recours immédiat au verdict populaire et un mandat de négociation qui vise à l'effacement de la plus grande partie de la dette nominale pour assurer sa viabilité.

Ce qui a été fait pour l'Allemagne en 1953 doit se faire pour la Grèce en 2014. Nous revendiquons :

Une " clause de croissance » pour le remboursement de la dette.

Un moratoire - suspension des paiements - afin de préserver la croissance.

L'indépendance des programmes d'investissements publics vis-à-vis des limitations qu'impose le Pacte de stabilité et de croissance

Un " New Deal » : projet européen d'investissements pour la croissance, financé par la Banque européenne d'investissement.

Un assouplissement quantitatif, avec le rachat direct des titres de dette publique par la Banque centrale européenne.

Nous déclarons aussi, haut et fort, que nous revendiquons toujours le remboursement du prêt imposé à la Grèce par les forces d'occupation nazies. Notre position sur ce sujet est connue de nos partenaires. D'ailleurs, dès le début de notre charge gouvernementale, cette question fera l'objet d'une demande officielle.

Nous sommes prêts à négocier et nous multiplions les contacts pour l'élaboration de plans communs et d'associations collaboratives au sein de l'Europe, pendant que le gouvernement Samaras se contente de préserver uniquement son alliance avec le gouvernement allemand et de se soumettre aux décisions des créanciers.

Voilà donc deux approches différentes qui posent le dilemme suivant :

Une négociation européenne avec un gouvernement Syriza ou la contre-signature de toutes les décisions des créanciers concernant la Grèce par le gouvernement Samaras ?

Ou, en deux mots : Négociation ou renonciation ? Croissance ou austérité ? Syriza ou Nouvelle Démocratie ?

En assurant une solution socialement viable au problème de la dette grecque, notre pays aura la capacité de rembourser le restant de la dette avec les nouvelles disponibilités créées par le retour à la croissance et non pas celles créées par les privations des excédents primaires.

Nous mettrons en œuvre tous les moyens pour assurer la relance économique et industrielle du pays :

• En augmentant immédiatement le programme des investissements publics de 4 milliards ;

• En réparant progressivement toutes les injustices commises par l'application du mémorandum ;

• En redressant progressivement les salaires et les retraites afin de renforcer la demande et la consommation ;

• En soutenant les petites et moyennes entreprises avec des incitations à l'emploi, l'industrie en subventionnant le coût d'énergie avec des clauses d'emploi et environnementales ;

• En investissant dans le savoir, la recherche, les nouvelles technologies avec également pour objectif le retour au pays des jeunes diplômés qui l'ont quitté pour chercher du travail ailleurs ;

• En reconstruisant l'État social, et du même coup, un État de droit et de méritocratie.

" Et, pendant les négociations, et avant d'aboutir à une solution européenne viable, qu'est-ce que vous faites ? Avez-vous un plan ? » C'est le genre de questions que nous ont posées avec bienveillance plusieurs personnes.

Conscients de notre responsabilité et aussi de l'inquiétude accrue pour l'avenir, nous répondons avec la franchise et la clarté requises par les circonstances. Nous nous engageons, face au peuple grec, à remplacer dès les premiers jours du nouveau gouvernement - et indépendamment des résultats attendus de notre négociation - le mémorandum par un Plan national de reconstruction, rigoureusement élaboré, et chiffré avec précision.

Le Plan national de reconstruction se constitue d'un ensemble de mesures pour le redressement économique et social, regroupées autour de quatre grands axes :

1. Mesures pour remédier à la crise humanitaire.

2. Mesures prioritaires pour la relance de l'économie.

3. Plan national de lutte contre le chômage et d'amélioration de la situation du marché du travail.

4. Rétablissement institutionnel et démocratique du système politique.

A. Mesures pour remédier à la crise humanitaire

Notre programme, d'un coût approximatif de 2 milliards d'euros, se constitue d'un ensemble d'interventions d'urgence créant un bouclier de protection pour les couches sociales les plus vulnérables. Il inclut :

1. L'énergie électrique à titre gratuit pour 300 000 familles qui se trouvent en dessous du seuil de pauvreté (3 600 kWh par an). Programme de subventions alimentaires (coupons-repas pour 300 000 familles).

La mise en place de ce programme sera effectuée par un organisme public chargé de coordination en collaboration avec les instances régionales, l'Église grecque, les mouvements associatifs solidaires et par le biais d'épiceries sociales subventionnées.

2. Soins médicaux gratuits pour tous, réduction drastique de la participation des patients aux dépenses pharmaceutiques. Notre projet prévoit l'accès gratuit pour tous (avec ou sans sécurité sociale) aux services publics de santé et la préservation de l'accès aux médicaments nécessaires, en diminuant drastiquement - jusqu'à l'intégralité pour certaines catégories - la charge des patients à la dépense pharmaceutique.

3. Projet pour l'accès au logement. Le projet prévoit la réhabilitation des anciens logements et hôtels abandonnés, afin d'assurer dans une première phase une disponibilité de 25 000 nouveaux logements avec des loyers subventionnés.

4. Mesures en faveur des petites retraites. Nous nous sommes déjà engagés pour le relèvement progressif des petites retraites. Nous nous engageons aujourd'hui, de surcroît et afin de renforcer la demande, à rétablir la prime du treizième mois pour les 1 262 920 retraités dont la pension ne dépasse pas les 700 €. Et cette mesure sera étendue - progressivement et en fonction de la conjoncture économique - à tous les retraités et à tous les salariés.

5. Réduction des prix des transports publics. Les chômeurs de longue durée et ceux qui vivent en dessous du seuil de pauvreté pourront bénéficier d'une carte spéciale à prix très réduit (voire symbolique) pour tous les transports publics.

6. Différenciation de la taxe spéciale de consommation sur les produits pétroliers, en fonction des usages (en tant que carburant ou combustible de chauffage) afin de réduire le prix du pétrole de chauffage (de 1,20 € à 0,9 €/litre).

B. Mesures pour la relance de l'économie

Le deuxième axe réunit les mesures de relance de l'économie, mesures dont la priorité est l'arrêt de la politique d'imposition actuellement menée malgré ses conséquences néfastes pour l'économie réelle, la mise en place d'une nouvelle seisachtheia [littéralement " remise du fardeau » : libération des dettes, mesure établie par Solon, pour faire passer l'intérêt de l'État avant celui des grands propriétaires] et le renforcement de la liquidité et de la demande.

Car la situation de l'économie réelle est aujourd'hui vraiment désastreuse.

Le raid fiscal opéré par le gouvernement sur la classe moyenne et la surimposition de ceux qui ne fraudent pas accablent la plus grande partie de la population, qui voit constamment menacés sa vie professionnelle, les bribes de son patrimoine et même sa propre existence. De cette angoisse insupportable témoigne le nombre record de suicides. Les classes laborieuses, les agriculteurs, les salariés, les petits et moyens entrepreneurs, le corps de l'économie réelle en somme, doit affronter actuellement une tourmente d'impôts qui dépasse leurs forces de résistance. Et sous peu c'est une nouvelle tourmente qu'ils vont devoir affronter. Celle des saisies par les banques, puisqu'ils rencontrent des difficultés à rembourser les emprunts qu'ils avaient contractés par le passé, avant la crise, avant leur chômage, avant la mutilation de leurs revenus, avant la fermeture de leurs entreprises.

L'obstination du gouvernement à accabler de charges supplémentaires ceux qui sont déjà à terre ne peut mener qu'à une impasse, tout simplement parce qu'on ne peut rien recevoir de quelqu'un qui n'a rien à donner : " Qui n'a rien, ne peut rien donner ».

Pour constater l'aberration de leur politique, il suffit de regarder le montant des créances attestées et non perçues par l'État : il est à ce jour d'environ 68 milliards d'euros. Et chaque mois qui passe, ce chiffre augmente d'un milliard d'euros.

C'est pour cela que nous sommes ici aujourd'hui. Pour établir la vérité sur l'économie réelle du pays et exposer les mesures d'urgence qui permettront de la délivrer de la pression qu'elle subit. Nous nous adressons aux millions de victimes de M. Samaras et de la troïka - salariés, petits et moyens entrepreneurs, agriculteurs, chômeurs - en leur dédiant notre intervention d'aujourd'hui.

1. Mesures pour la levée immédiate de la répression dans l'économie réelle :

Création de Comités spéciaux pour le règlement extrajudiciaire des litiges fiscaux dans chaque région afin de procéder au règlement immédiat des dettes fiscales authentifiées et non acquittées jusqu'au 31 décembre 2014. Le règlement des litiges fiscaux concernant les petites et moyennes entreprises pour des dettes authentifiées, amendes ou tout autre différend les opposant à l'administration fiscale sera prioritaire afin d'être établi équitablement et dans un délai de six mois le montant exact des créances réelles et percevables par l'État.

Les montants qui résulteront de l'apurement seront réglés en 84 mensualités et dans tous les cas de façon à ce que le montant total des versements annuels ne dépasse pas le plafond de 20 % du revenu annuel du débiteur.

Un processus de régularisation similaire des dettes arrivant à échéance sera appliqué aux conflits les opposant aux caisses d'assurances. En cas d'accumulation des dettes et de taxes contributives, le montant total des versements annuels de remboursement sera plafonné au 30 % du revenu annuel du débiteur.

L'engagement d'un processus de régularisation entraîne pour tout redevable l'arrêt immédiat des poursuites pénales et des saisies des comptes bancaires, de la résidence principale, des salaires, etc., ainsi que l'octroi d'une attestation de régularité fiscale.

L'engagement du processus de régulation entraîne également la suspension de peines et des mesures coercitives pendant douze mois pour les débiteurs dont l'absence de revenu est attestée.

Suppression de l'extension de la procédure simplifiée des flagrants délits à l'égard des débiteurs de l'État. Suppression de l'avance de 50 % de la dette établie comme condition préalable au recours du contribuable devant les tribunaux, en privant de la protection judiciaire les personnes incapables de payer. L'acompte sera défini par acte judiciaire et sera fixé selon la capacité financière (10 % à 20 %).

Avec ces mesures, nous n'aspirons pas uniquement à soulager les gens qui souffrent et qui forment l'épine dorsale de l'économie, mais aussi relancer l'économie réelle en la libérant de la répression étouffante des taxes et des majorations imposées, totalement improductives car non percevables.

Le bénéfice immédiat estimé par la régularisation des dettes et le début des paiements des acomptes nous permettra de financer des actions nécessaires pour l'allègement et la répartition équitable des charges.

D'ailleurs, dans le cadre des mesures visant à relancer l'économie, nous annonçons aujourd'hui l'abrogation immédiate de la nouvelle taxe foncière.

2. Abrogation immédiate de la nouvelle taxe foncière (ENFIA) car elle est le symbole de l'injustice sociale qui caractérise l'ensemble de la politique économique du gouvernement Samaras. Au service des grands patrimoines, les dirigeants actuels ont créé une taxe qui méprise les règles les plus élémentaires tant pour fixer sa base que son taux. Sans l'addition globale de la valeur de toutes les propriétés, sans l'établissement d'un barème de taux progressif, ou d'un seuil d'exonération, c'est une taxe prélevée au détriment des personnes pauvres et des couples à faibles revenus avec des enfants qui ont comme patrimoine unique leur résidence principale.

L' ENFIA, par conséquent, ne peut pas être corrigée, elle ne peut pas être améliorée - elle ne peut être qu'abrogée. À sa place :

• Nous établirons une taxe socialement juste sur la grande propriété (FMAP) et nous ne taxerons personne sur des valeurs fictives.

• Les valeurs des biens retenues pour la base d'imposition seront réajustées immédiatement de 30 % à 35 %.

• Son taux sera progressif et le seuil d'exonération élevé.

• La résidence principale sera exemptée, à l'exception des propriétés de grand luxe ostentatoire.

L'introduction de cette taxe dans le système fiscal grec fait partie de la réforme fiscale qui se mettra en place progressivement afin de rétablir sa conformité au principe constitutionnel de la répartition des charges fiscales selon la capacité contributive des personnes imposables, afin également d'enrayer toute possibilité de contourner la loi et afin de lutter efficacement contre la fraude fiscale.

3. Restauration du seuil de non-imposition à 12 000 €/an. Nous rétablirons la progressivité de l'imposition des personnes physiques en augmentant le nombre de tranches d'imposition et en restaurant le seuil de non-imposition de 12 000 €/an pour tous afin de redistribuer la charge fiscale au profit des personnes à faible et moyen revenu. Cette mesure est d'autant plus nécessaire qu'après quatre années de frénésie fiscale les " classes populaires » et les " classes moyennes » sont vraiment exténuées financièrement.

4. Nous créerons une " nouvelle Seisachtheia » (libération des dettes). Elle s'appliquera aux créances douteuses, aussi appelées " rouges », car leur effacement partiel est un préalable indispensable tant à l'assainissement des portefeuilles bancaires qu'à la restauration de la liquidité monétaire et au soutien de la croissance et de la relance de l'économie.

La " nouvelle seisachtheia » s'appliquera au cas par cas et consistera à l'effacement partiel des dettes des personnes qui se trouvent sous le seuil de la pauvreté. Elle régira en tant que principe général le rajustement des dettes des particuliers de façon à ce que leur remboursement (à l'État, aux banques, aux caisses d'assurance) ne dépasse pas le tiers du revenu de l'emprunteur.

5. Création d'un organisme public chargé de la gestion de la dette privée. Son rôle ne sera pas celui d'une " bad bank », mais bien au contraire il interviendra en tant que gestionnaire de toute dette envers une banque arrivée à échéance et sera également chargé du contrôle des moyens de recouvrement accordés par les banques.

Il garantira le traitement juste et équitable de tous les emprunteurs, en gérant l'ensemble des dettes exigibles envers les banques, avec la collaboration des Comités spéciaux d'arbitrage chargés à leur tour des dettes envers l'État et les caisses d'assurances, afin d'avoir une image globale des charges de tout débiteur et faciliter les remboursements.

Bien évidemment, il s'agit tout d'abord d'empêcher l'utilisation de la dette privée comme moyen de confisquer la propriété des citoyens et comme moyen de contrôler le secteur privé de l'économie.

Au cours des prochains jours, Syriza va déposer au Parlement un amendement législatif pour une prolongation indéfinie de la suspension de la vente aux enchères des résidences principales dont la valeur est inférieure à 300 000 €. Nous déposerons également une proposition d'interdiction législative de vente ou de cession des titres à des institutions bancaires non reconnues ou à des entreprises de gestion de contrats de prêts et de garanties. En deux mots, nous ne permettrons pas aux vautours des " distress funds » internationaux de spéculer en confisquant les maisons des citoyens.

Je l'ai dit l'année dernière, ici, à cette tribune - je le répète encore une fois cette année : la clé pour la relance de l'économie est le système financier. Avec Syriza au gouvernement, le secteur public reprend le contrôle de la Caisse de stabilité financière et exerce tous ses droits sur les banques recapitalisées. Cela signifie qu'il a le premier mot à dire sur leur administration.

En même temps, nous mettons en place des opérations ciblées afin d'assurer la liquidité dans l'économie réelle. Parmi ces opérations figure la mise en place d'une banque de développement et de banques spécifiques.

6. Mise en place d'une banque de développement et de banques spécifiques. Pour nous, la nouvelle architecture du système bancaire comprendra, outre les banques recapitalisées systémiques, de nouvelles banques coopératives spécifiques et une banque publique de développement.

C'est pourquoi, nous allons créer une Banque de développement et des banques à mission spécifique pour le financement des PME et des agriculteurs. Pour soutenir la liquidité nécessaire au développement d'équipes professionnelles dynamiques qui à leur tour donneront de l'énergie et une nouvelle impulsion à la croissance et au redressement productif.

7. Restauration du salaire minimum à 751 €. Nous augmenterons le salaire minimum à 751 € pour tous les travailleurs, indépendamment de toute condition d'âge.

Notre modèle économétrique confirme les conclusions du modèle de l'Institut du travail de la GSEE (Confédération générale des travailleurs grecs) : la restauration du salaire minimum non seulement n'aggrave pas, par son coût, la croissance mais elle lui est même bénéfique. Selon les estimations, même en ne prenant en compte que la première année de sa mise en place, elle aura comme effet une augmentation de la demande intérieure de 0,75 % et du PIB de 0,5 %. En outre, elle permettra de créer 7 500 nouveaux emplois.

Le troisième axe de notre Plan national de redressement que nous vous présentons aujourd'hui s'inscrit dans la perspective de notre grand objectif national, celui de rétablir le plein emploi dans notre pays, de redonner de l'espoir et des perspectives d'avenir à nos jeunes qui émigrent massivement alors que leur force vive est nécessaire pour reconstruire notre pays.

C. Plan de reprise de l'emploi

1. Restauration du droit du travail. Les droits des travailleurs supprimés par les lois mémorandaires seront immédiatement rétablis en même temps que le salaire minimum. Les conventions collectives seront rétablies ainsi que le principe de la prorogation des avantages acquis en vertu d'une ancienne convention collective ou accord. L'OMED (Organisme de médiation et d'arbitrage), chargé du soutien des négociations entre employeurs et employés, sera également rétabli dans ses fonctions. Les réformes concernant les licenciements collectifs et abusifs, les contrats précaires de " location des employés » seront abrogées.

2. Plan de création de 300 000 nouveaux emplois dans les secteurs publics et privés et dans ceux de l'économie sociale. Nous mettons immédiatement en œuvre un programme spécial d'aide à la reprise d'emploi, qui s'étale sur deux ans, d'un coût total de 5 milliards d'euros dont 3 milliards pour la première année. Le programme prévoit une augmentation nette des postes - environ 300 000 - dans tous les secteurs : privé, public et dans le secteur de l'économie sociale et solidaire.

La mise en place d'un programme de cette ampleur a pour vocation - et je dirais même pour contrainte - l'insertion des chômeurs de longue durée, des seniors de plus de 55 ans et des jeunes. Il concerne en somme tous ces chômeurs qui ne pourront pas trouver un emploi sans incitations spécifiques à l'embauche.

En dehors de l'administration locale, leur insertion dans le secteur privé sera accompagnée de subventions ciblées pour la création de nouveaux postes pour les jeunes de 15-24 ans et les chômeurs de longue durée de plus de 35 ans, dans les petites et moyennes entreprises.

Notre projet prévoit également de financer des partenariats public-privé en faisant appel à des prestataires privés pour la gestion des équipements et des opérations de service public. Ces contrats de partenariat seront accompagnés de clauses d'embauche de chômeurs de longue durée et de jeunes. Des aides financières sont également prévues pour les chômeurs qui créent de nouvelles entreprises ou leur propre activité.

3. Les catégories des bénéficiaires de l'allocation chômage seront élargies. Avec la réduction du nombre de chômeurs actuel, par la création de 300 000 nouveaux emplois, nous pourrons faire bénéficier de l'allocation chômage un nombre équivalent de chômeurs à qui les critères sociaux actuels ne permettent l'accès à aucune autre allocation.

Le quatrième axe de notre Plan national concerne les changements institutionnels, des changements majeurs, à savoir les transformations qu'apportera Syriza aux institutions et à la fonction publique.

D. Interventions pour la reconstruction institutionnelle et démocratique de l'État

Dès la première année de la gouvernance de Syriza, nous mettons en œuvre le processus de redressement institutionnel et démocratique de l'État.

Le redressement de l'État est en effet devenu une nécessité. Cependant, il ne peut être atteint par des cycles successifs de licenciements, qui plus est, de licenciements souvent illégaux, et ce par des illégalités commises pour atteindre des objectifs budgétaires insignifiants et ce aux dépens de services souvent essentiels pour le bon fonctionnement de l'État.

Donc, nous procédons directement au renforcement institutionnel et opérationnel des trois cellules de la République : le Parlement, les collectivités locales et le syndicalisme de base.

1. Nous soutenons les structures régionales. Nous renforçons tout d'abord la participation démocratique et la transparence, l'autonomie économique et le fonctionnement efficace des municipalités et des régions. Nous organisons une transition ordonnée vers un État décentralisé. En parallèle, nous amorçons le dialogue avec la société et les instances régionales pour le remplacement du plan de décentralisation actuel (" Kallikratis ») par un nouveau cadre institutionnel pour la décentralisation qui sera achevé avant les prochaines élections régionales.

Progressivement, nous augmentons les ressources des collectivités régionales pour renforcer leur participation active au redressement productif du pays. Ainsi, elles pourront bénéficier non seulement de prêts à faible taux d'intérêt, mais aussi de l'émission par la future Banque de développement des obligations destinées au financement de leurs interventions.

2. Nous renforcerons les institutions de la démocratie représentative et introduirons de nouvelles applications institutionnelles de la démocratie directe dans le fonctionnement du système politique, telles que l'initiative législative populaire, le veto populaire, le référendum d'initiative citoyenne.

Nous renforcerons le rôle du Parlement dans sa fonction législative et sa fonction de contrôle de l'exécutif, nous délimiterons sévèrement l'immunité parlementaire et nous supprimerons le statut particulier des ministres en matière de responsabilité pénale qui institutionnalise une " déviation vicieuse des principes d'une société démocratique ».

3. Nous redéfinissons la charte de fonctionnement de l'ensemble des moyens de diffusion de l'information grecs, en redessinant le paysage audiovisuel conformément aux exigences légales et avec une surveillance accrue sur leur transparence. Nous renforçons les médias régionaux. Nous créons une vraie télévision publique, démocratique, pluraliste et de haute qualité en reconstituant l'ERT à partir de zéro.

Nous, nous ne promettons pas. Nous nous engageons. Et maintenant, ici, dans la 79e exposition de Thessalonique, nous ouvrons un grand débat avec les citoyens pour aboutir à la prise de décisions en commun. Ce débat se prolongera avec treize autres conférences régionales programmatiques qui viendront illustrer ce nouveau processus de planification, décentralisé et démocratique, de la politique de notre pays.

Nous aspirons à un consensus national et social sur le long terme qui engage notre responsabilité commune sur les choix et les décisions qui concernent la reconstruction de notre pays.

Il ne s'agit pas là d'un simple effet d'annonce. Il s'agit du seul espoir de notre peuple, de la condition de la survie nationale et sociale.

C'est pourquoi, aujourd'hui, nous vous avons présenté, non pas ce que nous souhaitons, mais ce que nous pouvons faire. Un plan réaliste et réalisable d'apaisement social et de relance de l'économie. Notre plan est chiffré. Nous avons calculé le coût total du plan immédiat contre la crise humanitaire et le coût budgétaire de la suppression des mesures fiscales qui ont été imposées arbitrairement par le gouvernement actuel.

Il sera entièrement financé par les actions suivantes :

Tout d'abord par toutes les mesures et les procédures de régularisation que j'ai déjà présentées. Car nous attendons d'elles un double avantage, aussi bien social qu'économique. D'une part, qu'elles soulagent des citoyens de l'emprise d'une imposition lourde et qu'elles reconstituent de leurs capacités contributives et d'autre part, qu'elles inversent la récession et relancent l'économie. Sur les 68 milliards d'euros de dettes exigibles, les régularisations permettront à l'État d'encaisser au moins 20 milliards sur une durée de sept ans, dont 3 milliards dès la première année.

La répression de la fraude et de la contrebande, si elle est menée avec détermination et animée par la volonté politique de faire hardiment face aux grands intérêts privés, sera une autre source de recettes pour l'État. Et ici, permettez-moi d'ouvrir une parenthèse. La déclaration de Mme Lagarde sur les menaces dont elle aurait fait l'objet (à la suite de ses critiques sur l'attitude des Grecs face aux impôts) est stupéfiante. Mais le silence du gouvernement l'est tout autant. Il est même inacceptable. Et je pose la question : Tous ces gens qui en écoutant nos propositions agitent le doigt en ressassant toujours la même phrase " avec quel argent ? » ont-ils entendu cette déclaration ? Envisagent-ils de faire quelque chose ? Répondront-ils un jour aux questions qui concernent l'impunité scandaleuse dont bénéficient certaines catégories de personnes ?

Synthèse et articles Inprecor

Nous, nous avons déjà élaboré un plan d'action étalé sur six mois contre cette gangrène, qui prévoit, tout d'abord, l'intensification et l'accélération des contrôles des transactions intragroupe, des " listes Lagarde », du Liechtenstein, des transferts de fonds, des sociétés offshore et de l'immobilier à l'étranger. À cet effet, on met en place un service spécial composé d'experts et muni du support technologique approprié après la longue, déplorable et énigmatique inaction du gouvernement actuel.

Deuxièmement, notre plan d'action prévoit l'amélioration et la rapide installation de systèmes d'entrées-sorties et de détecteurs moléculaires dans tous les réservoirs et toutes les stations d'essence afin d'éradiquer la contrebande des carburants.

Notre projet prévoit également l'installation accélérée de détecteurs à rayons X, aux entrées douanières du pays, car nous pouvons et nous voulons être efficaces dans la lutte contre la contrebande à la fois des carburants, des cigarettes et d'autres produits.

Les estimations des recettes provenant de la répression de la fraude fiscale et de la contrebande, ont parfois été très ambitieuses. Nous, avec modération, nous estimons que notre plan d'action apportera aux caisses de l'État, la première année, au moins 3 milliards d'euros.

En ce qui concerne le coût du capital de départ du secteur public, du secteur intermédiaire et de banques spécialisées - estimé à 3 milliards d'euros - il sera financé par le soutien de 11 milliards d'euros prévu pour les banques par le Mécanisme de stabilité.

Quant au coût de notre plan pour la reprise de l'emploi, estimé à 3 milliards d'euros pour la première année de son application (5 milliards d'euros coût global), il sera financé par les fonds structurels (FEDER et FSE) prévus (CRSN 2007-2013 : 1 milliard + 1,5 milliard dans le cadre de ESPA 2014-2020), et 500 millions d'euros par d'autres fonds européens pour le soutien de l'emploi.

Et ici, je voudrais ajouter que dans le cadre des efforts titanesques que nous engagerons pour la restauration des retraites, notre gouvernement attribuera aux fonds d'assurance certaines des parties du patrimoine public qui stagnent actuellement dans les tiroirs du TAIPED (Fonds de privatisation). C'est une mesure nécessaire pour réparer le crime du PSI (" private sector involvement ») qui a dévasté les caisses d'assurance et les détenteurs d'obligations, avant la restauration progressive des retraites.

Je viens de répondre de manière claire, au moyen de faits et de chiffres, à l'éternelle question que l'on nous pose depuis trois ans à chaque fois que nous proposons une voie de sortie de la crise : " Avec quel argent ? »

Mais aujourd'hui, au-delà de l'analyse des coûts et des bénéfices de nos engagements, je veux souligner le besoin de voir la crise et ses impératifs d'un autre œil que celui du petit comptable qui ne sait qu'aligner des chiffres.

Il faut aussi faire preuve d'un regard critique et libéré de tout dogmatisme. L'économie n'est pas une simple comptabilité. Plusieurs facteurs dynamiques concourent à un résultat et déterminent l'économie. Ce n'est pas un exercice de répartition de ressources limitées. C'est un système ouvert avec des capacités de production.

Nous, nous connaissons bien les chiffres néfastes de l'économie que nous allons hériter de nos prédécesseurs. Nous connaissons l'état pitoyable causé par les œillères des gouvernements mémorandaires. Mais nous sommes aussi profondément convaincus qu'il y a une possibilité de sortie du bourbier de la récession. Elle implique la mobilisation de toutes les Grecques et de tous les Grecs. La mobilisation et le salut du potentiel productif de notre pays. De tous ceux qui restent debout, qui résistent et se battent.

Nous, nous croyons que SEUL le désir des classes laborieuses, des créateurs féconds et productifs, et surtout des jeunes, de dépasser la condition actuelle et de s'ouvrir un nouvel horizon peut remettre debout la Grèce et son économie.

C'est une aspiration collective, un projet commun et l'espoir d'un meilleur avenir qui peuvent ramener à notre pays la croissance et non pas l'outillage de l'OCDE et les recettes du FMI.

C'est le patriotisme, la droiture d'esprit, l'ingéniosité et l'étoffe du citoyen grec qui aura le courage et la force de porter sur ses épaules la réussite du Projet de redressement national, en mettant à profit les potentialités inestimables et les avantages incomparables de notre terre et de ses habitants.

D'ailleurs, chers amis, c'est devenu maintenant une prise de conscience collective : La crise que nous vivons n'est pas seulement économique, elle n'est pas seulement une destruction du tissu productif, une récession prolongée et un désinvestissement. La crise est aussi sociale, comme le démontre on ne peut plus clairement le caractère sans précédent en temps de paix du chômage et de la pauvreté. Mais c'est aussi une crise des institutions et des valeurs, une crise de confiance de la société envers la politique, le Parlement, les partis politiques, les syndicats. Une crise de confiance sur notre propre capacité à affronter ensemble, en tant que société, la crise.

C'est pour cela que le point de départ de la réflexion de notre projet est cette ultime analyse, cet ultime constat : il est de la première importance de croire à notre force collective, de croire, nous tous, à un avenir meilleur que nous dessinerons et nous matérialiserons ensemble, " Simul et Singulis ». Ensemble et aussi individuellement, car notre force est collective mais elle suppose la conscience de notre propre responsabilité en tant qu'individus. Chaque personne a besoin de croire à un État respectueux et bienveillant à l'égard de l'individu et de la société, mais l'État et la société ont également besoin des individus soucieux du bien-être commun. Un État décentralisé et concentré sur ses citoyens, en somme.

Nous devons croire à notre capacité, en tant que corps social, à tracer des projets collectifs, mais nous devons aussi nous engager personnellement et consciencieusement à leur matérialisation.

Ce défi ne nous intimide pas. Nous avons prouvé par le passé et à des moments encore plus difficiles de notre histoire que nous en étions capables.

C'est pour cela que le premier cycle des mesures de réédification de la société débutera avec la mise en œuvre de deux actions parallèles.

La première consiste à affronter les causes endogènes de la crise.

La deuxième concerne les causes extérieures, en revendiquant une nouvelle place et un nouveau rôle pour notre pays au sein de l'Europe, des Balkans, de la Méditerranée et dans le monde.

Ceux qui croient que la relance de l'économie - si un jour, elle s'amorce - réduira par son simple fait la pauvreté et le chômage ou qu'elle restaurera la confiance dans la politique et les institutions, se trompent. En revanche, si notre projet est simple, concret et réaliste, c'est parce qu'il se fonde sur un diagnostic pragmatique. Et aussi et surtout parce qu'il est subversif. Le réalisme commande le renversement des choix uniques des néolibéraux, le renversement des enfermements mémorandaires.

Aujourd'hui, Syriza a fourni des réponses à la fois réalistes et subversives. Nous n'avons pas formulé des suppositions. Nous avons pris des engagements. Nous n'avons pas partagé des promesses. Nous avons départagé des responsabilités.

Car nous nous engageons dans un sentier ardu. Ce n'est pas seulement de la terre brûlée que va trouver le gouvernement de Syriza, mais un pays divisé et dévasté politiquement, socialement et économiquement.

Notre responsabilité : le rassembler et le ramener à la terre ferme et féconde du redressement, de la démocratie, et de la justice sociale. C'est cette responsabilité que nous avons voulu partager avec vous aujourd'hui. La responsabilité d'un combat commun pour la Grèce dont nous sommes dignes. Pour une Grèce volontaire et fière, démocratique et juste.

C'est cela notre dette vis-à-vis de notre histoire, vis-à-vis de nos enfants, vis-à-vis de notre avenir. ■

Thessalonique, le 13 septembre 2014

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