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Le Venezuela trace la voie d'une réponse progressiste à la crise

par Sébastien Brulez
Quartier Gramoven à Caracas. Photothèque Rouge/Sébastien Ville

Sébastien Brulez, journaliste belge, est le correspondant de <i>La Gauche</i> (revue de la section belge de la IV<sup>e</sup> Internationale) à Caracas et ex-collaborateur de la chaîne d'information latino-américaine TeleSUR. Cet article a d'abord paru sur le site web de La Gauche <a href="http://www.lcr-lagauche.be&quot; target="_blank">www.lcr-lagauche.be</a&gt;

Le président vénézuélien Hugo Chávez a présenté ce samedi une série de mesures économiques face à la crise mondiale. Alors que les gouvernements néolibéraux entendent faire payer la débâcle capitaliste aux travailleurs, Caracas ouvre la voie d'une réponse progressiste. Il s'agit, entre autres, de débloquer 100 milliards de dollars d'investissements publics sur les quatre prochaines années, d'augmenter de 20 % le salaire minimum en 2009 et de limiter les revenus des hauts fonctionnaires.

L'annonce était attendue par beaucoup, y compris par l'opposition qui espérait des mesures impopulaires comme l'augmentation du prix de l'essence ou une dévaluation du Bolívar (la monnaie locale). Rien de tout cela ne figure finalement à l'agenda (1).

A contre-courant des recommandations classiques du FMI ou de la Banque mondiale, Caracas a présenté ce samedi un plan d'investissements publics à hauteur de 100 milliards de dollars (2) sur les quatre prochaines années. " Le gouvernement révolutionnaire va investir une masse globale de 100 milliards de dollars. Et cela n'inclut pas les investissements pétroliers qui eux atteindront 125 milliards. C'est une des plus fortes mesures anticycliques et anticrise », a expliqué le président Chávez.

Par ailleurs, le budget 2009 de l'État sera revu à la baisse (- 6,7%) et recalculé sur un prix du baril de pétrole à 40 dollars, au lieu des 60 dollars comme base actuelle. Afin de faire face à cette réduction, l'État doublera pratiquement son endettement interne et fera des économies sur les salaires des haut fonctionnaires.

Selon les chiffres présentés par le président Chávez en Conseil des ministres, la dette externe du Venezuela représentait 64,1 % du Produit intérieur brut (PIB) il y a 20 ans et se situe aujourd'hui à 9,3 % (fin 2008). La dette interne se situe quant à elle à 4,3 % du PIB. " Ce pourcentage peu élevé nous permet aujourd'hui de prendre des mesures d'augmentation (de la dette interne), calculées de façon exacte afin de nous protéger et de nous renforcer », a-t-il déclaré.

Par ailleurs, le mandataire a appelé l'Assemblée nationale (le Parlement) à légiférer afin de limiter les salaires des hauts fonctionnaires. En qui concerne l'Exécutif, un décret devrait être publié dans les prochains jours afin de réviser et réduire les revenus les plus élevés. Les dépenses somptueuses sont également concernées. " Nous allons éliminer les frais des véhicules de luxe, les cadeaux, la construction de nouveaux sièges, les missions à l'étranger, la publicité superflue, etc. », a déclaré Hugo Chávez.

Hausse du salaire minimum

Parmi les mesures figure également une augmentation du salaire minimum de 20% en deux étapes : 10 % à partir du premier mai et 10% en septembre prochain. Celui-ci passera donc, cette année, de l'équivalent de 274 euros à 331 euros par mois, se maintenant parmi les plus élevés d'Amérique latine.

La seule décision qui sera directement répercutée sur le portefeuille de la population, afin d'équilibrer en partie le budget de l'État, est l'augmentation de 3 % de la TVA. Elle passe ainsi de 9 % à 12 %, loin derrière les 16% de la fin des années 1990. " De la même manière que nous avons réduit la TVA de 14 à 9% lorsque nous jouissions des hauts revenus pétroliers, maintenant nous effectuons une augmentation prudente ».

Finalement, le gouvernement a confirmé la nationalisation (annoncée il y a déjà plusieurs mois) de la banque filiale du groupe espagnol Santander, Banco de Venezuela. Si cette décision se concrétise, l'État vénézuélien contrôlera 25 % du secteur bancaire et en sera l'acteur le plus important. Ces actions, accompagnées de la ferme volonté de maintenir les dépenses sociales en matières d'éducation, de santé et d'infrastructures, démontrent qu'il n'y a pas de fatalité face à la crise capitaliste et qu'un gouvernement souverain, non soumis aux diktats des institutions financières internationales et des entreprises, peut agir en fonction des intérêts des travailleurs... lorsque l'intention y est.

A Caracas, le 23 mars 2009

notes
1. La chaîne privée Globovision était même allée jusqu'à inventer l'annonce imminente d'une diminution de la quantité de devises étrangères octroyées à chaque Vénézuélien. L'information, qui s'est révélée totalement fausse, fut relayée par plusieurs médias d'opposition avant d'être démentie par un communiqué du ministère de l'Économie et des Finances.

2. Le 23 mars, un dollar était égal à 0,73 euro.

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