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En politique, il n'y a jamais rien d'inexorable

par Didier Epsztajn
Damien Millet et Éric Toussaint, La crise, quelles crises ?, Éditions Aden/Cetim/Cadtm, Bruxelles 2010, 285 pages, 20 euros

Face aux discours sur l'exposition de la crise financière et de la récession, comme fourmillement surgi du néant, ou comme élément marginal du fonctionnement du système capitaliste, Damien Millet et Éric Toussaint soulignent " L'interconnexion des crises à l'échelle mondiale ». Ils insistent, à juste titre sur la crise alimentaire, la crise écologique et climatique (" bien que la crise trouve son origine dans les pays les plus industrialisés, les populations des pays "pauvres" seront plus fortement touchées que celles des pays "riches" »), la crise migratoire et la crise institutionnelle internationale.

Les auteurs rappellent les élaborations alternatives : " Un autre scénario est tout à fait possible. L'objet de cet ouvrage est de le démontrer en analysant les mécanismes reliant ces différentes crises et de contribuer à dégager les voies qui permettent aux peuples de mettre fin à leur soumission aux grands créanciers et aux grandes puissances. »

Ils détaillent les conséquences de la " grande transformation des années 1980 » et particulièrement du rôle de la dette sur les différentes économies. Puis ils analysent " La crise financière déclenchée en 2007 » en développant leurs propos bien au-delà des éléments détonateurs. Ils résument les propositions " écartées par la longue nuit libérale » : arrêt des privatisations et des déréglementations, transferts vers le secteur public, réduction radicale du temps de travail, généralisation des retraites par répartition, politiques salariales, etc.

Cinq noms emblématiques, ceux des " économistes » responsables de la déréglementation bancaire des années 1990, aujourd'hui appelés à diriger la " nouvelle politique » américaine illustrent le chapitre " Face à la crise, Barack Obama confie les clés du coffre aux escrocs ». Puis Damien Millet et Éric Toussaint exposent les raisons de la probable nouvelle crise de la dette au Sud, " les importantes réserves de changes que les pays en voie de développement (PED) avaient engrangées ces dernières années » ne pouvant jouer longtemps le rôle d'amortisseur.

Le chapitre " La crise alimentaire » permet aux auteurs de critiquer les fausses explications autour de la consommation chinoise et indienne et d'affirmer la triple responsabilité des sociétés transnationales de l'agrobusiness, des groupes financiers et des spéculateurs et des organismes internationaux et des gouvernements du Nord. Les auteurs présentent, entre autres, les contrepropositions de Via Campesina et leurs propres élaborations.

Le chapitre sept aborde la responsabilité du mode de production capitaliste dans la modification du climat. Les auteurs illustrent leurs analyses d'exemples internationaux très précis.

Avant d'aborder les expériences en cours au Vénézuela, en Équateur et en Bolivie, Éric Toussaint décrypte la crise de la gauche et le bilan très négatif de la démarche social-démocrate et du désastre stalinien. Il y oppose une démarche anticapitaliste qui " intègre obligatoirement une dimension féministe, écologique, internationaliste et antiraciste ».

En lien avec l'analyse des expériences sud-américaines, l'auteur souligne la nécessité " fondamentale de mettre en place une relation interactive entre un gouvernement de gauche et le peuple, qui doit renforcer son niveau d'auto-organisation et construire d'en bas des structures de pouvoir populaire. » Je ne reviens pas ici sur les analyses détaillées de ces expériences, je renvoie aux articles parus dans Inprecor de septembre/octobre 2009.

L'ouvrage se termine par une description des évolutions du mouvement altermondialiste.

Il est complété d'une chronologie sélective (1999-2009) permettant la réflexion sur la réelle marche du monde, loin des faits-divers ou des résultats sportifs, distillés à longueur de journée et embrumant les réalités d'un fantasque nuage dissolvant d'autres possibles.

En annexes : la Charte politique du réseau CADTM International, la Déclaration finale d'octobre 2008 de la Conférence internationale d'économie politique, " Les réponses du Sud à la crise économique mondiale » et la Déclaration de l'Assemblée des mouvements sociaux lors du Forum social mondial 2009 à Belém.

Enfin, il convient de lire attentivement les données sur les " Chiffres de la dette en 2009 » dont je reproduis, sans commentaire, la première phrase " Le revenu des 500 individus les plus riches de la planète dépasse les revenus cumulés des 416 millions de personnes les plus pauvres. »

 

 

 

 

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