Corse, communauté de destin et projet politique

par A Manca
Paul Alfonsi, Allégorie de la Corse, Bastia, bibliothèque du patrimoine Tommaso Prelà – Fonds Mattei, album historique de la Corse n° 3 (©Bibliothèque du patrimoine Tommaso Prelà/Pascal Lemaître).

Tout projet dit« d'évolution institutionnelle » implique que celui-ci soit porté par un projet politique ancré dans la réalité de notre pays.

La Corse n'est donc pas une région de France parmi d'autres, mais un territoire à part entière avec son histoire, sa culture, sa langue et ce dans un espace géographique compris dans l'ensemble méditerranéen.

Sa relation avec l'État français se caractérise par un rapport de dominant à dominés vivant dans une zone de tous temps considérée par la puissance française comme périphérique. Ce paradigme prend ses sources dans un passé désormais connu de tous. Passé marqué par une agression militaire sur une nation alors indépendante. Cet acte fondateur a déterminé au cours des temps un rapport attentatoire aux droits fondamentaux de tout un peuple.

Quel que soit le projet envisagé, il ne peut donc avoir de débouchés politiques positifs sans que soit reconnu l'existence du peuple corse à qui il appartient, en dehors de toute tutelle d'exercer son droit à disposer de lui-même selon un principe d'autodétermination.

Ce processus démocratique implique prioritairement à tout autre aspect la recon­naissance du peuple en tant qu'acteur majeur de sa propre histoire. De fait, la ques­tion d'une citoyenneté de plein droit et exercice est posée.

À l'heure où des courants fascisants tentent d'imposer leur vision xénophobe, homophobe, misogyne et globalement discriminante, le concept de « communauté de destin » est d'une part le seul à même de leur faire barrage, mais bien au-delà à jeter les bases d'un projet réellement émancipateur.

Une autonomie pleine et entière doit donc se traduire par un projet répondant tout à la fois aux exigences démocratiques, culturelles, économiques et sociales.

Au sein de ce processus, le monde du travail doit bénéficier des ferments d'une véri­table justice sociale fondée sur une indépendance de classe inaliénable à des inté­rêts qui lui sont extérieurs.

Aujourd'hui fracturé par un racisme prégnant et paralysé par un système économique prédateur, le monde du travail voit ses capacités d'intervention entravées. Or c'est lui qui crée les richesses et permet ainsi à toute notre société de fonction­ner. Il a donc toute légitimité à exiger dans les débats de l'heure et pour l'avenir, que soient prises en compte ses revendications et sa place centrale au sein du peuple corse.

Encore faut-il pour que soient réunies toutes ces conditions qu'une dynamique politique vienne concrétiser ses légitimes prétentions à un projet de société émancipateur.

A Manca s'attelle sans répit depuis ses origines afin qu'à une revendication démocratique soit indissolublement liée à une revendication politique en rupture avec un système porteur des pires tentations.

L'éradication de la pauvreté, l'égalité entre les sexes, la survie d'une langue et l'inclusion de toutes celles et ceux, quelles que soient leurs origines, dans une citoyenneté digne de ce nom ; tout cela ne peut se matérialiser par des incantations, mais par la prédominance du plus grand nombre, donc du monde du travail.

Rompre avec toutes les formes d'aliénation ne relève pas aujourd'hui d'une utopie fumeuse et hors-sol, mais d'une impérieuse nécessité.

Sucialisimu o Barbaria

Oghje più chè mai

 

Le 21 avril 2024